Les Frères Karamazov par zeugme
Les sentiments que m'inspirent ce livre sont si partagés que ça en est troublant pour moi. D'un côté certains passages sont brillants, sinon extraordinaires. Je pense naturellement au hors-piste de Dostoïevski sur le grand inquisiteur et Jésus. Scène surréaliste mais affirmation d'une pertinence incroyable, qui mérite d'être lue indépendamment du reste de l'histoire tellement le propos est intelligent et éclairé.
En même temps, on retrouve cette intelligence russe (je pense très fort à Soljenitsyne) pour faire cohabiter chez à l'intérieur de personnages des tempéraments et motivations opposées sans la moindre invraisemblance. Dostoïevski parvient à faire passer le lecteur par des émotions variées pour les principaux antagonistes avec une aisance apparente qui laisse jaloux.
Toutefois, et c'est un fait rarissime en ce qui me concerne, ce livre m'a aussi fait incroyablement décrocher dans certains de ses sauts d'une intrigue à l'autre avant de me perdre complètement dès que le procès commence. Dès l'arrestation et le premier interrogatoire, ce livre perd son sel à mes yeux. On revisite alors ce qu'on a déjà lu, pour des raisons scénaristiques indiscutables, mais qui tuent l'attention (déjà bien sollicitée) du lecteur. Après deux tentatives j'ai finit par le refermer sans doute définitivement. Ma note est toute théorique, puisque je suis partagé moi aussi entre des sensations complètement opposées. Pour trancher, c'est tout de même une lecture que je recommande, ne serait-ce que pour ses moments de bravoure.