Retour de lecture sur "Les heures", un roman de Michael Cunningham, publié en 1998. Ce livre relate l'histoire de trois femmes, sur une journée de leur vie, qui vivent à des époques différentes. Tout ce livre tourne autour du roman de Virginia Woolf, "Mrs Dalloway", puisque la première femme est l'auteure elle-même lorsqu'elle commença l'écriture de ce livre en 1923, la seconde une lectrice en 1949 et la troisième pourrait être le personnage principal transposé à l'époque actuelle. le titre du roman correspond lui-même au titre que Virginia Woolf voulait donner à son roman, avant de faire un autre choix. Je n'ai pas lu "Mrs Dalloway" mais cela n'est pas un handicap important pour lire "Les heures", même si j'ai très probablement raté un certain nombre de références. Cette lecture est par contre une belle invitation à le faire, pour découvrir l'univers de Virginia Woolf. Cunningham nous dresse le portrait de trois femmes, tout ce qu'il y a de plus banal, mais qui ont en commun le fait qu'elles subissent un mal de vivre, sans raison évidente. La grande qualité de ce livre réside dans sa capacité à nous parler, avec beaucoup de réalisme et dans une ambiance de douce amertume, de ce vague à l'âme diffus et de nous expliquer comment, les petits riens du quotidien arrivent à transformer leurs vies en une peine accablante. L'incommunicabilité de cette souffrance morale rend le parcours de ces femmes particulièrement difficile à vivre et lui donne une dimension tragique. le démarrage de la lecture est un peu laborieux, mais le fait de passer à chaque chapitre à un personnage différent et donc de changer d'époque et de lieu, permet de donner un certain rythme, et on ne s'ennuie finalement pas dans ce roman qui est relativement court. Ce livre raconte l'histoire de trois femmes différentes, et pourtant à travers Mrs Dalloway qui est omniprésente dans leur parcours, c'est d'une certaine manière trois fois la même femme dans des contextes différents. En les faisant évoluer à des époques différentes, l'auteur en profite pour montrer l'évolution des moeurs au cours du XXieme siecle, notamment sur les questions de l'homosexualité et de la santé mentale. Ce livre, qui pourrait juste passer pour un exercice de style original, est donc bien plus profond que cela. A travers une écriture très sensible, c'est l'âme de ses personnages, qui ont une psychologie très fine, que l'auteur décortique. La fin du roman permet de relier encore un peu plus ces trois histoires, et c'est au final un roman subtil, très juste et très touchant qu'il nous a livré. Celui-ci a été adapté au cinéma par Stephen Daldry. Un film sur lequel je n'aurais pas misé un kopeck tellement l'adaptation du roman me semble difficile, mais comme il a été plusieurs fois récompensé et qu'il est interprété par Meryl Streep, Julianne Moore et Nicole Kidman apparemment au sommet de leur art, je sors finalement de cette lecture avec un autre livre à lire mais également un film à voir.