A l’âge de vingt ans, Moe part vivre avec un homme à Paris. Mauvais choix. Quelques années plus tard, maltraitée et abusée, elle n’est plus que l’ombre d’elle même. Décidée à le quitter, elle suit une « amie », mais ne trouve pas de travail adapté à sa vie de mère célibataire. Son nourrisson sous le bras, elle est emmenée par les services sociaux dans un centre d’accueil pour déshérités, surnommé « La Casse ». On y vit dans des carcasses de voitures entassées, formant les quartiers d’une misérable cité où règne la loi du plus plus fort. Chaque épave est attribuée à une personne. Moe prend possession d’une 306 grise qui devient son logement. Dans son quartier, elle rencontre cinq femmes qui vivent soudées pour affronter le monde hostile qui les entoure. Il y a Ada, une vieille afghane qui a gagné le respect dans la cité par ses décoctions médicinales, il y a Jaja, Poule et Marie-Thè, toutes des écorchées qui reviennent de loin pour survivre encore et toujours. Il y a Nini, celle qui veut encore profiter de la vie. Chacune d’elle conte son histoire. Ensemble, elles s’entraident et se battent dans cette zone de non-droit, travaillent pour gagner quelques pièces, maigre espoir d’agrémenter leur quotidien. Mais Moe garde en tête de fuir cet endroit, de retrouver une vie digne, et d’espérer un futur pour son fils. Pour atteindre ce projet, elle est prête au pire, mais ne s’attend pas au prix qu’il lui faudra payer.
Le style est froid, dur, immersif : on entre dans le récit immédiatement, entraîné par une écriture intimiste, au plus proche des personnages, pour ne râter aucune de leurs émotions. Etonnamment ce style m’a parfois pesé et pourtant je reconnais que de cette écriture précisément nait une puissante empathie envers des protagonistes plongés dans un cauchemar que l’on ne souhaite à personne : une vie ou survie forgée d’épreuves, oscillant entre désillusions et maigres espoirs. Cette dystopie a des allures de conte cruel, qui dépeint un monde si proche et si sombre que l’angoisse ne me quitte pas bien après avoir refermé ces pages. Al’instar du post-apocalyptique « Et toujours Les Forêts« , l’auteure explore les sentiments d’une personne et les confronte à des phénomènes de société extrêmes, nous proposant une réflexion sur notre futur. C’est à cela que servent les dystopies, à nous rappeler qu’ils faut nous méfier des conséquences de nos actes, et c’est le message que Sandrine Collette réussit toujours à faire passer. Je vous le conseille.