Les Lisières
7
Les Lisières

livre de Olivier Adam (2012)

Il y avait d'autres lisières à explorer

J'avais bien aimé "Des vents contraires", pour le style, pour Saint-Malo, pour une dramaturgie plutôt tonique. Même si certains traits du narrateur m'agaçaient (auto-apitoiement, alcoolisme facile, irresponsabilité avec les enfants pour être un père adoré, provocation gratuite des gens qui pensent différemment...) son rapport à la nature et aux perceptions sensorielles me parlaient beaucoup.

J'ai bien aimé le début des "Lisières", car j'y retrouvais ces éléments, quasi répliqués, mais avec une dimension supplémentaire liée à la vie d'ado banlieusard des années 80-90 aux parents peu démonstratifs ; un ado devenu un peu artiste ou en tout cas un marginal de la vie professionnelle classique. Tout en évitant de trop répéter "Des vents contraires", ces nouveaux éléments présentaient une telle proximité avec certains aspects de ma propre vie que je ne pouvais que ressentir une certaine empathie pour Paul Steiner, une forme de fraternité ; j'éprouvais logiquement le plaisir d'une compréhension mutuelle, même si je retrouvais les traits qui m'agaçaient auparavant.
Mais, me méfiant des facilités de la connivence et des clins d'œil de génération dans une œuvre, j'attendais quand même d'autres choses à côté, une dramaturgie qui porte le tout. Si celle-ci reste classique et se tient, elle est tellement diluée qu'elle perd de sa force.

Le problème tient à des considérations politico-sociales assez usées et qui ne bénéficient pas d'un regard "aux lisières", innovant, que promettait le titre. Comme si l'absence au monde que ressent le narrateur devait être compensée par l'idée rassurante qu'il y a les gens "de gauche" (lui) et les gens "de droite" (son frère), et que sans leurs liens familiaux, ces gens n'auraient rien à se dire. La société française se résumerait à deux vieux camps éternellement opposés. Bien que ses personnages passent leur temps à justement exprimer l'échec de la politique des vingt dernières années, Paul Steiner défend finalement l'idée qu'il vaut mieux laisser ensemble les gens qui pensent pareil, que tout dialogue est impossible. C'est pourtant lui-même qui décide que ses affinités avec les autres sont soumises à l'appartenance politique. Par sa posture à part, d'observateur et d'auditeur attentif des autres, j'aurais espéré que Steiner soit capable de formuler une philosophie moins simpliste, moins scindante, à l'image par exemple de la pensée zen, puisque le Japon est son autre grand amour.
bersound
6
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le 16 janv. 2014

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