Avec Les loyautés, Delphine de Vigan revient à un registre social, proche de celui de Les heures souterraines. Le succès de Rien ne s'oppose à la nuit et de D'après une histoire vraie n'a visiblement pas asséché son talent et ce nouveau livre, aussi court soit-il, est d'une densité remarquable sous-tendue par une intensité permanente qui en fait une lecture étouffante et haletante à la fois. Construit sur une alternance de voix, autour de 4 personnages, 2 pré-adolescents et 2 femmes, le livre témoigne de souffrances multiples : chômage, divorce, alcoolisme, dépression, solitude ... Théo, Mathis, Hélène et Cécile dysfonctionnent, chacun à leur façon et leur survie ne dépend finalement que de leur loyauté, qui à son père, qui à son fils, qui à l'un de ses élèves (pour Hélène, la prof au centre du récit, elle-même victime de violences familiales dans son enfance), qui à soi-même. De Vigan a encore simplifié et fluidifié son style qui ne conserve aucune trace de gras. Son roman est poignant sans verser dans un quelconque misérabilisme et sans la volonté farouche de toucher au réalisme à tout prix. C'est une fiction avant tout mais traitant de réels problèmes individuels et sociétaux avec des individus qui se débattent et se laissent parfois couler. Presque rien ne s'oppose à leur chute. mais c'est le presque qui fait toute la différence et explique l'aspect positif du titre du livre : Les loyautés.