Que fais-tu au rayon folio SF, pour commencer ?

Quand j'ai commencé ce livre qui se déroulait d'abord sur Terre, j'imaginais le monde d'Ambre comme une cité haute-technologie, rattachée à des mondes plus ou moins médiévaux pour un maximum de possibilités. Qu'elle ne fut pas ma surprise quand l'auteur commença à parler d'épées, de costumes bouffants et de bataille navale ?!
Si ce n'est que ça, j'accepte la surprise et me plonge dans l'histoire.

Corwin se réveille amnésique mais sent, au fond de lui, les réponses qu'il doit donner. Reprendre le trône qui lui revient de droit lui vient avant sa mémoire, alors qu'il se souvient simplement détester l'actuel prétendant, Eric. Je n'ai pas très bien compris en quoi l'un était plus légitime que l'autre, je suppose à la description de la fratrie qu'ils n'ont pas la même mère mais, puisque chacun y va de son opinion, on dirait qu'ils sont tous légitimes. Les guerres d'alliances et de tromperies n'en seront que plus intéressantes.

Cependant, et malgré son succès, j'ai trouvé que le livre s'essouffle rapidement. Le vocabulaire n'est pas très varié, il manque cruellement de style pour transmettre l'épique qui, en échange, sera ressenti par les chiffres dantesque qu'on nous jette à la figure. Des centaines de bâtiments qui se fracassent en mer, sortez votre calculatrice ! J'enlève x, je rajoute y, je multiplie par z et je divise par le carré de la surface du pôle nord. Sans être affreux à lire, ce n'est pas pour autant captivant, les batailles sont vites torchées et sans rebondissement. D'une certaine façon, c'est peut-être mieux puisqu'ils y en a beaucoup. Vraiment. Au lieu de nous concentrer sur une bataille décisive, Zelazny veut nous raconter chaque jour de cette conquête pour le trône.
Résultat, le paroxysme de cette campagne tombe à plat, puisqu'il est prévisible et un peu lassant, bien moins palpitant que le duel entre Corwin et Eric en début d'intrigue. La suite est ensuite d'une longueur à mourir et la fin m'a laissée perplexe. J'ai aimé ma lecture, somme toute, mais je n'ai pas envie de lire la suite.
Je ne sais pas pourquoi Eric est plus méchant que Corwin, je ne sais même pas vraiment qui est Corwin, si ce n'est un homme fou d'ambition à qui on a greffé des qualités artificielles pour attirer la sympathie. "je me soucis des gens, c'est pour ça que je fais faire un bain de sang pour le trône, ambition purement égoïste".

J'en arrive au principal défaut que j'ai trouvé : la politique d'Ambre. On ne sait rien du fonctionnement de ce monde, de ses habitants. Comment savoir qui serait un meilleur roi alors que nous ne savons pas comment se porte le pays ? Je n'ai même pas très bien compris combien de temps le trône reste vacant, ni si tous les habitants vivaient des milliers d'années. Comment considérer le temps si nous ne savons pas comment les princes vieillissent ? S'ils ne vieillissent pas, comment peuvent-ils être adulte ? Pourquoi Corwin déteste à ce point Eric ? Ils ont l'air de tous s'être fait des crasses mais Corwin pardonne à tous sauf à Eric. Corwin, de son côté, est-il exempt de responsabilité ou a-t-il commencé les hostilités ?
Tellement de questions essentielles qu'il aurait fallu traitées avant de se taper 100 pages de combat. Un monde au potentiel si riche qui parait si vide !