Une jeune ethnomusicologue retourne, pour y débuter un mémoire, dans le village où est quasiment née sa vocation : Crottarda, hameau perdu au fond d’une vallée sombre et froide, où la nuit, lors de vacances avec ses parents, elle entendit jadis d’étranges appels évoquant des chants polyphoniques. Ces appels, attribués à des bergers qui communiquent d’un alpage à un autre, semblent étrangement tabous dans le village où l’accueil des habitants, entre moquerie narquoise et franche hostilité, ne cesse de désarçonner la jeune femme. En dépit du soutien assez paradoxal de Bernardetta, jeune fille qui masque de sombres ruminations sous ses airs un peu simples, la chercheuse aura bien du mal à percer les secrets de ces chants nocturnes.
Les Oscillants est de ces textes qui imposent leurs règles d’emblée : dès les premiers chapitres, il paraît évident qu’aucune résolution n’est à attendre tant le texte s’efforce d’ouvrir sans cesse de nouvelles trappes, de déployer sous la description certes quelque peu étrange mais tout de même pittoresque de ce village isolé tout un réseau souterrain d’allusions à une réalité plus mystérieuse, semblable à ces sous-bois spongieux et ces dolines insondables qui entourent le village et nourrissent un folklore vaguement préoccupant. Claudio Morandini profite de cette ambiguïté pour nous lancer sur différentes pistes interprétatives quant à la nature de son récit : est-ce une fable métaphysique, un simple conte grinçant, un récit d’horreur ? Là aussi, à chacun de tirer ses conclusions. Si, précisément pour cette raison, Les Oscillants lasse un peu sur la longueur, faute de pouvoir trouver une issue aux enjeux posés dès l’entrée du récit, il possède toutefois un charme certain, à rapprocher de l’ambiance fangeuse des Saisons de Maurice Pons ou des récits fantastiques de Leo Perutz.