Ses deux premiers romans réalistes n'ayant point trouvé d'éditeurs, Dick se dit qu'il faudrait peut-être se rediriger, du moins provisoirement, sur ce qui a fait son succès: la littérature de genre. Ses nouvelles de science-fiction dans les pulps le font déjà vivre après tout... Pourtant, c'est au fantastique qu'il décide, contre toute attente, de se frotter. Quelques nouvelles témoignaient déjà de son intérêt pour le genre (Le Roi des Elfes, Sur la Terre sans joie,...) avec plus ou moins de bonheur.
Les Pantins cosmiques est un récit assez court mais sans temps mort. Armé de son écriture la plus lapidaire, Dick se révèle pour le moins efficace. Le suspens est bien présent, les personnages intrigants et les thèmes abordés font tous déjà partie du panel bien rodé de l'auteur. Perte d'identité, incertitude du réel, bonheur impossible dans la vie de couple... On est en terrain connu. Trop peut-être: malgré quelques très bonnes surprises, l'intrigue, pour plaisante qu'elle soit, ne décoiffe jamais vraiment. Les dialogues présentent parfois cette manie déjà vue dans les nouvelles de jeunesse de faire répéter aux personnages deux ou trois fois une information que le lecteur a déjà comprise, merci, mais dans l'ensemble, le tout sonne assez juste. Dick sait camper rapidement des personnages sans avoir besoin d'approfondir leur psychologie.
Le plus intéressant dans ce roman est sans doute l'utilisation du zoroastrisme, pour laquelle l'écrivain a du mener des recherches qui ont un peu chamboulé ses certitudes spirituelles (qui relevaient du christianisme). Après avoir gouté à une religion bithéiste (ainsi interprétait-il le dualisme zoroastrien), Dick trouvait effectivement difficile de revenir au monothéisme (et quid du Diable alors ? Ouais, bon, Dick ne me répondra plus...). Une nouvelle démonstration du lien étroit entre ses évolutions personnelle et littéraire.
Sorti de tout contexte, le roman reste agréable mais, faute d'approfondir pertinemment ses thèmes (le cosmicisme épique de la fin, bordel !), survole doucement la mémoire avant de faire de la place aux prochaines lectures.