Derrière ce nom envoûtant de "villes invisibles" se cachent les récits de voyage que dresse Marco polo à l'empereur Kubilai Khan. Vous vous en doutez un peu, ça dépayse plus que la carte postale de Tata Ghislaine en cure thermale ou que les dernières prouesses des Ch'tis à Punta Cana.
Les différents récits sont très courts (de une à trois pages) et forcément un peu inégaux, c'est l'exercice qui veut ça. Certains sont excellents et font regretter la brieveté de la ballade, d'autres s'oublient rapidement. Jamais de description ultra détaillée, mais plutôt des esquisses, avec leurs lots de mystères suspendus.
Calvino distingue plusieurs catégories et les alterne : les villes et la mémoire, les villes et le désir, les villes et le ciel, les villes cachées, etc. La constante c'est que ce sont toutes des cités imaginaires, rarement placées dans un cadre réaliste mais plutôt dans quelque chose d'étrange ou onirique. J'ai parfois pensé à Borges pour ce côté décors énigmatiques, hors de l'espace et du temps. Des décors qui ne sont pas des coquilles vides, puisque parler d'eux sert aussi à parler de ceux qui les ont bâtis, leurs moeurs, leurs coutumes, leurs obsessions.
Le tout entrecoupé de discussions entre Marco Polo et Kubilai Khan, genre décontractés du gland sur une terrasse du palais impérial, à déviser sur les voyages et ce qu'ils changent en nous.
Ce qui est cool dans ce bouquin c'est qu'il est propice à la rêverie. Il peut se lire très vite avec ses 180 pages très découpées, mais on se surprend assez souvent à le poser sur ses genoux pour laisser l'esprit déambuler dans ces villes, voire dans d'autres que l'on aura imaginé à son tour. C'est ce qu'il m'est arrivé en tout cas, et je pense avoir aimé le livre autant pour les mots qu'il contient que pour ceux qu'il ne contient pas. Autant pour ses propres images que pour celles qu'il a engendré par ricochet.
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La musique qui va avec :
IMHOTEP - BIOMIMETRIC ARCHITEXTURE
https://www.youtube.com/watch?v=bDXzMUju1Ts