On m'avait fortement incité à la lecture de cette correspondance d'André Gorz à sa femme, me vantant la façon dont l'auteur prenait conscience de l'importance de son épouse avec le recul des années. Je suis ressorti de cette lecture déçu et même un peu agacé. Car c'est lettre à D. est avant tout une lettre sur A. Comment A. est devenu journaliste, écrivain, comment D. a toujours été d'un grand soutien. Mais ce qui manque à ce livre pour être un manifeste de la déconstruction, c'est bien D. Qui est-elle ? Que fait-elle ? Quelles sont ses aspirations ? Quelle a été sa vie, à part celle de "femme d'écrivain"? André Gorz nous présente son épouse sous les traits d'une femme d'exception, au prétexte que c'est elle qui lui a permis d'écrire et d'être écrivain, la réduisant ainsi au statut de muse sans substance... Partant de ce postulat, ce court livre n'est qu'un banal ego trip en forme d'excuses un brin tardives. Finalement, le fait de publier cette lettre à D. me semble surtout un nouveau moyen de parler d'A. encore et toujours et de se servir à nouveau de D. pour flatter son ego, un ego gonflé par les louanges sur ce texte "gorgé d'amour", que j'ai pour ma part trouvé surtout gonflé de soi-même...