Je ne suis pas sûre d'avoir le courage de produire une critique réelle de l'œuvre, étant donné le nombre d'éléments significatifs présent dans ce livre.
En ouvrant pour la première fois le livre, j'ai été frappé par la prose lyrique des premiers chapitres, je suis un peu une collectionneuse d'incipit & celui-ci est foudroyant. L'ambivalence du livre est déjà là, la fascination morbide aussi. Immédiatement j'ai été charmé & dégoutée par la complexité des personnages, le soin de la description. La poésie d'Humbert Humbert est profondément fascinante, l'exaltation amoureuse entre-coupée de phrases obscènes, dérangeantes, cachées au cœur du texte.
La personnalité d'Humbert Humber se déploie lentement, & on se sent tellement choqué d'être touché par cet homme cynique & intelligent, prompt à l'auto-dérision qui titille notre identité européenne raffinée face à l'américain moyen, & bien sur pédophile. Lolita est elle aussi un personnage en profondeur, & Nabokov a parfaitement su cerner les traits caractéristiques de l'adolescence. & en même temps, on explore toute la vie américaine de l'époque, autant des mœurs que des paysages, Nabokov retranscrit avec style toute la palette de couleurs des autoroutes que ses personnages traversent.
J'ai été un peu moins enthousiaste à la seconde partie du livre, d'une part car le personnage de Lolita s'opacifie, d'autre part car le déplacement constant des personnages ainsi que la consommation de l'acte sexuel brouille les pistes. Humbert Humbert se perd en lamentations, & son œil aiguisé transmue tout en lamentation. & puis, il n'y a plus à retenir son souffle, il n'y a plus de retours possibles, & le dégoût s'accroche trop rapidement aux descriptions scabreuses de Mr. Humbert. Pour autant, il n'y a aucun passage nihiliste, où l'auteur cherche à choquer, à détruire une vision de la réalité, à réduire la moralité au rang d'accessoire. Au contraire, & c'est là force de l'œuvre, on se laisse presque prendre à cette histoire d'amour, à cette vie érotique naissante, du moins dans la première partie de l'histoire. On se sent salement complice, à certains points de l'histoire, on est autant séduit par la nymphette que par son horrible papa.
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