Madame Bovary. C'est le titre de ce livre qui débute pourtant par le récit de moments de l'enfance de Charles Bovary (son futur mari) ainsi que de son premier mariage avec une femme stricte, pas forcément belle... mais à la fortune appréciable. Lui n'est qu'un médecin de petites gens, sans grande renommée ni ambition (contrairement à M. Homais le pharmacien).
Madame Bovary, c'est le titre d'une œuvre qui s'achève en nous narrant l'état d'esprit de Charles, veuf, en découvrant les tromperies d'Emma, désespéré par l'enterrement, par les dettes accumulées par sa compagne, par le futur sordide (selon lui) qui attend sa petite fille.
Au milieu de tout cela, il y a logiquement le récit des aventures d'Emma, cette jeune fille de paysan qui rêve d'amour passionnel et immortel, mais qui se heurte à la lâcheté d'un séducteur, à la lassitude d'un amant sur lequel elle prend un ascendant oppressant, au vice d'un notaire éperdu ; qui rêve de Paris mais doit se contenter de Yonville et de Rouen ; qui rêve surtout de romantisme et de perfection, mais doit se contenter de livres pour satisfaire à ses espérances.
D'avoir trop idéalisé la vie et l'amour, la jeune femme, belle et désirable pour beaucoup, s'est brisée les ailes, s'est heurtée à un mur de réalisme impitoyable.
Elle voulait le luxe, elle n'a obtenu que les dettes après, certes, de fugaces moments de douceurs et de volupté (avec Léon son amant le plus aimé).
On peut la traiter d'égoïste en voyant le peu d'attention qu'elle a envers sa fille, envers le peu de gratitude (malgré le respect) qu'elle ressent pour son mari, la peur dédaigneuse (mais elle n'est pas la seule) dont elle fait montre à l'aveugle mendiant de Rouen ; mais on l'aime au final comme n'importe quel homme du roman, eux charmés de sa beauté et de sa distinction (elle semble parisienne), nous (les lecteurs) touchés par son côté passionnel, entier, sa sensibilité et son attrait pour le romantisme accouplé de perfection et d'éternité.
Alors on la plaint malgré ses fautes, malgré l'empathie que l'on ressent envers le mari trompé, quasi abandonné.
En parallèle on rit beaucoup dans Madame Bovary du ton léger voir provocateur de Flaubert, au style parfait, ni trop descriptif ni trop épuré ; des querelles théologiques et religieuses entre M. Homais et le curé de Yonville, de l'ambition et de l'opportunisme du pharmacien, de la filouterie de Lheureux le créancier principal du couple Bovary, de la scène rocambolesque de l'amputation d'Aristote...
Yonville paraît alors si réel, chaque personnage est si bien décrit dans son caractère que le village prend vie sous nos yeux, avec ses histoires de voisinage, ses lieux symboliques, sa réception des comices agricoles...
Madame Bovary, Rouault, Carles Bovary, Emma Bovary, la tragédie de Yonville ; au fond peut importe le titre de cette œuvre qui s'attache à raconter le drame sentimental d'une jeune femme en dehors du réel, mais qui a su créer tout un univers autour d'elle, prégnant, réaliste et attachant.
Une vraie leçon de littérature !