Malevil
8.1
Malevil

livre de Robert Merle (1972)

Hum. 10, c'est pas souvent alors je vais argumenter un peu.

L'argument de poids pour ce 10 est le lieu de l'action. Le livre se déroule en France. Ce n'est pas du chauvinisme. Seulement, il est tellement plus facile de s'imaginer à la place des personnages quand le décor est un décor familier. La campagne profonde, moi, ça me parle, j'y ai vécu. Cela se passe dans les années 70, mais cela ne paraît pas si éloigné.

Mais même pour un citadin pur souche, il est quand même plus simple d'imaginer la campagne française que la campagne généralement américaine des bouquins post-apocalyptiques. Le plus flagrant est l'armement. On se retrouve ici limité à quelques fusils de chasse. C'est tellement NORMAL ! C'est moins exotique que les revolvers ou voire même mitrailleurs US.

Les anectodes racontées sont celles que me racontaient mes parents. Et remplir les bouteilles de vin dans la cave, je l'ai fait (certes avec du cidre). Les frictions entre les personnes pour les élections municipales sont celles que l'on retrouve dans tout village, encore aujourd'hui : l'opposition communiste/grenouille de bénitier est très présente, comme elle l'était en 70 partout en France.

Les personnages sont des gens que l'on connaît presque. Le paysan lambda (Peyssou), l'artisan lambda (Colin), le mec qui tente des trucs un peu à part dans l'agriculture et qui s'en sort bien (Emmanuel, son oncle et ses chevaux)... Et surtout La Menou. Sérieux, la petite vieille acariâtre qui gère la boutique, ce personnage est formidable (et amène involontairement des touches humoristiques bienvenues). On connaît tous une grand-mère comme ça.
Attention, quand je dis lambda, je ne dirais pas "sans intérêt" ou "stéréotypés". Ils ont tous une personnalité approfondie, leurs qualités, leurs défauts, sans tomber dans le cliché. Ils sont juste vrais.

Plus que la survie, ce sont bien les relations humaines qui sont racontées dans cette oeuvre. Il est question de la religion, de la vie en communauté et de son organisation, des rivalités exacerbées par l'évènement. Chaque personne révèle la part sombre de l'humain à un moment donné, entre ceux qui veulent le pouvoir ou ceux qui devront faire des choses qu'ils n'auraient jamais imaginés faire en temps "normal". Mais on y voit aussi le bon côté : l'entraide voire le sacrifice pour le groupe et des amitiés proches d'une famille.

Le narrateur peut être parfois énervant car il n'est pas sans défaut. S'il devient assez naturellement le meneur du groupe et dévoile son côté manipulateur pour arriver à son but, il n'oublie pas que son but justement, est d'aider. Pas de dictature à Malevil.

Mention spéciale également au passage décrivant l'évènement en lui-même et le premier jour suivant. Lourd, long, pesant, mais très prenant et juste. De même pour la dernière partie du livre, avec une montée de la pression très bien gérée et un climax réaliste, sans "héros sauveur du monde".

Concernant les défauts du récit, le livre n'est pas exempt de contradictions ou d'omissions arrangeantes. Mais même si parfois, on lève les yeux en se disant "heuuu, mouais vite fait là quand même..." (le système d'eau potable fonctionne nickel ? Ô_o), cela ne détériore pas le récit et cela l'allège de problèmes très secondaires. On peut parfois également désapprouver certaines décisions. Les rapports hommes-femmes par exemple. Ces dernières participent moins aux prises de décisions, et se retouvent souvent aux taches ménagères. Leur minorité les réduits parfois au statut de (précieux) utérus sur pattes. Mais il faut également avouer que cela représente quand même bien la place de la femme dans le monde rural dans les années 70. On voit qu'elles influent fortement les décisions mais pas encore directement.

Même les défauts de ce livre seraient preques des qualités. D'où le 10.
KuroTruc
10
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le 6 mars 2013

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KuroTruc

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