De cette romancière Jane Austen, j'arrive presqu'au bout de son œuvre avec "Mansfield Park" qui est un roman de "la maturité". Il faut entendre par cette expression que contrairement à certains romans comme "Orgueil et Préjugés" ou "Raison et Sentiments" qui ont été commencés tôt et publiés tardivement, "Mansfield Park", comme "Emma", ont été écrits sur des périodes plus courtes mais dans la deuxième partie de la vie de Jane Austen.
De fait, je trouve que "Mansfield Park" est d'un d'accès plus difficile que les autres romans d'Austen.
Au départ du roman, il y a les trois sœurs Ward qui vont connaitre des destins différents qui donneront une orientation au roman. Une des sœurs a fait un beau mariage avec le baronet Sir Thomas. La deuxième fait un mariage de raison avec un clergyman, Mr Norris qui mourra rapidement la laissant veuve et la troisième fait un mariage d'amour avec Mr Price, pauvre, avec une foultitude d'enfants. Sir Thomas, dans sa grande bonté, conscient de sa bonne fortune, décide de recueillir la veuve, Mme Norris et une des filles Price, Fanny, 10 ans, dans sa grande demeure de Mansfield.
On repère très vite que le personnage principal du roman sera cette Fanny Price, recueillie par charité dans la famille Bertram. En quelque sorte, Austen fait de son roman, un chemin d'apprentissage de 10 à 18 ans en chemin plutôt hostile. Fanny va naviguer entre indifférence de la part de la famille Bertram et mépris de la part de la veuve Norris à l'exception notable d'Edmond, fils cadet Bertram, qui entretient avec elle une relation amicale et protectrice.
Tout l'intérêt du roman va reposer sur l'évolution de Fanny qui est une enfant très timide, consciente de son infériorité et de la "chance" qu'elle a eue d'être extirpée de sa famille (pauvre) pour accéder à une bonne éducation … Discrète, effacée, acceptant les rebuffades (malveillantes) de sa tante Norris, elle est douée d'une grande capacité d'observation de la micro-société qui l'entoure et se forgera, en même temps, une véritable personnalité. C'est ainsi qu'elle percera à jour les vrais caractères des deux jeunes Crawford, Henry et Mary. Henry qui tente de la séduire en vain et Mary qui s'intéresse à Edmond.
Comme souvent, c'est aussi l'occasion pour Jane Austen de stigmatiser les limites du régime patriarcal d'une famille à travers le comportement de Sir Thomas qui veut garder la haute main sur les destinées des enfants suivant son propre intérêt (ou l'intérêt supposé de la famille) mais qui en fait n'est pas capable de maîtriser leurs comportements.
Bien entendu, lorsque survient la crise au sein de la famille Bertram, Jane Austen va faire triompher la vertu à travers le comportement irréprochable de Fanny. Le plus drôle sera qu'elle va quand même examiner une alternative possible pour résoudre habilement la crise. Mais cette alternative, faite de diverses compromissions, n'est pas acceptable. Évidemment.
Le portrait de Fanny est magnifique. On ne peut qu'aimer le personnage de cette jeune fille, fait d'une part de timidité et de réserve mais d'autre part de courage, d'intransigeance et de droiture. À la fin, Fanny est devenue le seul élément de stabilité de la famille …
Cependant, sorti du - beau – personnage de Fanny, ainsi que mentionné plus haut, j'ai trouvé que le style de narration ou de construction était plus difficile d'accès que dans les autres romans d'Austen. Des phrases très longues en particulier. Et puis, plusieurs scènes comme la balade à Sotherton ou la représentation théâtrale, anodines en simple lecture, s'avèrent essentielles pour découvrir les différents caractères des personnages qui se révèleront ultérieurement, nécessitant de fréquents retours en arrière.
Au final, cela reste un passionnant ouvrage mais le style un peu lourd fera que je noterai ce roman un peu en retrait …