To oblivion
Depuis quelques années l’on revient en France sur certains auteurs oubliés des années 1910-1930. On ne peut que louer cela, même s’il serait bon peut-être de d’abord chercher à faire surgir les...
le 3 mai 2014
6 j'aime
4
Je ne comprends pas, partout l'on vous parle de la sensibilité à fleur de peau de Victor Bâton, héros et narrateur du premier ouvrage aussi court que brillant d'Emmanuel Bove. Affaire de sensibilité, sûrement, la mienne m'incite à voir dans les rapports de Bâton à l'amitié qui lui fait tant défaut qu'il la projette sur des Billard (enfin au moins un, Henri) plutôt l'égoïsme de la dépression, de la solitude, l'égocentrisme prudent mais redoutable de mesquinerie que pousse une vie réduite à sa portion congrue : soi.
A travers sa narration au tout premier degré, Bove décortique une indigence matérielle et morale peu reluisante et néanmoins touchante ; quelque chose qui porte aujourd'hui le nom technico-moche de passif-agressif, cette légère névrose née des tensions entre le réflexe social et l'égoïsme naturel.
Notre héros est un être plat, seul, pauvre, pour autant empreint des règles d'usage d'une société civilisée ; à corps et à cris il déclame sa volonté de donner mais ne sait pas recevoir. Il offre sa sympathie mais n'a pas (plus ?) d'empathie.
L'exemple le plus criant se présente sous la forme d'un certain Neveu, un être tout aussi seul, encore plus pauvre, rencontré à l'occasion d'une tentative d'apitoiement du malheureux Bâton. Neveu est suicidaire ; Bâton veut vivre encore et toucher enfin un autre de sa bonté, emporter ce Neveu plus pauvre que lui et en faire son ami dévoué.
Ses espoirs tombent à l'eau, pas celle de la Seine mais une fois de plus dans le bain noir et glacé de la solitude, où seule se reflète son âme trop gonflée de vide, non loin des rives de la folie.
Ce petit bouquin à l'écriture précise n'est cependant pas qu'un triste examen à charge de l'altruisme en général et de sa forme naïve en particulier, il est aussi poilant, par moments (si si !).
Je n'avais pas l'intention de mourir, mais inspirer de la pitié m'a souvent plu. Dès qu'un passant s'approchait, je me cachais la figure dans les mains et reniflais comme quelqu'un qui a pleuré. Les gens, en s'éloignant, se tournaient.
La semaine dernière, il s'en ait fallu de peu que je ne me fusse jeté à l'eau, pour paraître sincère.
Créée
le 12 janv. 2020
Critique lue 349 fois
2 j'aime
D'autres avis sur Mes amis
Depuis quelques années l’on revient en France sur certains auteurs oubliés des années 1910-1930. On ne peut que louer cela, même s’il serait bon peut-être de d’abord chercher à faire surgir les...
le 3 mai 2014
6 j'aime
4
Premier roman d’Emmanuel Bove (1898 – 1945) publié en 1924 par les éditions Émile-Paul frères alors qu’il n’avait que vingt-cinq ans, «Mes amis» fut couronné d’un grand succès avant de retomber dans...
Par
le 14 mai 2016
3 j'aime
Je ne comprends pas, partout l'on vous parle de la sensibilité à fleur de peau de Victor Bâton, héros et narrateur du premier ouvrage aussi court que brillant d'Emmanuel Bove. Affaire de sensibilité,...
Par
le 12 janv. 2020
2 j'aime
Du même critique
Comment flatter à peu de frais une forme d'intellect auprès du spectateur moderne avec sa f***ing série (ou son f***ing film / clip) ? Disposer d'un à plusieurs des ingrédients suivants : Photo...
Par
le 15 janv. 2018
27 j'aime
2
Ou quand Winding Refn rencontre Christopher Nolan. On peut dire que l'ambiance est chiadée entre la très belle bande son, le spectaculaire des images et la lenteur savante de la réalisation. Mais la...
Par
le 6 mai 2020
20 j'aime
7
Cela n'a évidemment aucun sens de mettre une note à Nietzsche, à Baudelaire, à Shakespeare, à Mozart ... le pire étant peut-être le 6 ou 7 condescendant ! Grotesque. Ici la note (le 10 n'a pas...
Par
le 9 mars 2020
11 j'aime
1