Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée... par Laure Lemon
Il y a peu j'ai lu un article concernant Christiane F. sur LeMonde.fr. Je me suis souvenue que mon père m'en avait parlé pendant mon adolescence comme étant un livre qui l'a marqué. Après avoir commandé le livre, j'en ai discuté avec une amie allemande qui m'a expliqué qu'elle l'avait lu à l'école et qu'il était très difficile.
Après l'avoir lu, je me dis bonjour l'ambiance en classe ! J'ai trouvé que le titre en français, trop sensationnaliste, n'allait pas avec le récit. Je préfère le titre allemand Wir Kinder vom Bahnhof Zoo ("Nous, les enfants de la station Zoo"), qui ne met pas l'accent sur sa vie en particulier, mais celle d'une génération d'adolescents perdue et décimée par la drogue dans le Berlin des années 1970.
Le récit est simple, limpide, direct, et prend aux tripes. Au fil des pages on sent sa gorge se serrer, et les "non Christiane, ne fais pas ça" se succèdent dans la tête. On se mord l'intérieur des joues, l'estomac plombé, quand on apprend la mort de son amie Babsi, la plus jeune morte des junkies d'Allemagne. On assiste impuissant à ses nombreuses tentatives de sevrage et aux échecs répétitifs. On lit l'angoisse panique de la mère, complètement perdue, essayant d'aider sa fille sans succès, sans appui d'aucune structure médicale ou gouvernementale. De son premier joint à sa première passe en passant par sa première piqûre d'héroïne, Christiane est poussée par l'envie, le besoin, d'appartenir à une bande, d'être cool, ce qui m'a glacé le sang. Quel adolescent n'a pas eu cette envie ? D'une étape à l'autre, quel est le déclencheur, où se situe la fine limite entre ce besoin et les moyens qu'on met en oeuvre pour y parvenir ?
Ce livre m'a aussi donné envie de retourner à Berlin pour voir la ville sous un autre angle, pas la capitale hyper dynamique d'un point de vue historique et culturel qui m'a tant impressionné. Tant de musées et de monuments sur la seconde guerre mondiale, mais où sont les hommages aux enfants de la station Zoo ? Après la description de Gropiusstadt par Christiane, et la spirale béton - ennui - drogue / délinquance mon image des banlieues françaises (et d'ailleurs) a aussi changé.