Au mois d’août 2022, le narrateur, double de l’auteur, se trouve dans un parc londonien. Il y croise Paul McCartney. Admirateur des Beatles depuis sa jeunesse, le narrateur souhaiterait adresser la parole à Sir Paul, mais il ne sait pas comment s’y prendre. Alors, avant de se lancer, il va d’abord remettre de l’ordre dans ses souvenirs, les ordonner pour pouvoir aborder le chanteur.
Et tout d’abord la mort d’une mère, la solitude de l’enfance auprès d’un père avec qui le dialogue ne s’est jamais noué et d’une belle-mère taiseuse. Une plongée dans la Bible que l’enfant interprète comme il peut, imaginant un Dieu dépassé par ses créatures et pas toujours bienveillant. Un Eternel qui voyage au côté du père dans la Traban familiale avec Johnny Cash sur la banquette arrière ou parfois Rod Stewart. Des séjours dans la famille de la belle-mère au cœur d’une nature omniprésente. Et bien sûr, cette passion pour les Beatles qui ne s’est jamais démentie, et dont la séparation vient perturber le jeune garçon en arrivant quelques temps après le décès de sa mère.
Jón Kalman Stefánsson mélange les époques, les souvenirs, les rencontres dans ce récit exigeant et qui demande toute l’attention du lecteur. La solitude subie amène le jeune garçon à nouer une amitié profonde avec ses voisins, deux vieilles personnes avec qui il aborde les sujets qui le préoccupent. Sans doute pour contenir la tristesse, il se construit une sorte de monde parallèle habité par différents personnages et ces interlocuteurs privilégiés sont les défunts comme s’il était plus facile d’obtenir des réponses auprès des morts que des vivants.
C’est un roman très intime, profondément mélancolique avec parfois quelques pointes d’humour et surtout beaucoup de poésie comme toujours chez cet auteur. Un récit destructuré mais jamais confus qui nous amène au cœur de l’enfance, qui explique comment et sur quelles bases un homme se construit. Le sous-marin jaune, c’est en fait la chambre à soi du narrateur, un lieu de retrait pour se retrouver, un espace réconfortant et protecteur où se réfugier.
Une fois de plus un magnifique roman de Jón Kalman Stefánsson qui, décidément, ne déçoit jamais.