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L’homme n’a qu’à rougir devant le chien…

Après avoir refermé le livre de Cédric Sapin-Defour « Son odeur après la pluie », ou les vies emmêlées de l’auteur et de son chien Ubac, j’avais vraiment envie de faire une pause (mon deuil ?), le temps de dire adieu à ce bouvier bernois mémorable, et puis, lors d’une commande en ligne d’un livre de cuisine, le site me propose un titre étrange « Montaigne, Kant et mon chien » (subrepticement glissé là, grâce aux "cookies", très probablement) d’une autrice inconnue.
Je n’ai pu résister.


Audrey Jougla n’est pas n’importe qui. Elle née à Saint-Cloud en 1985, elle est chanteuse (auteur-compositeur-interprète), auteure, essayiste et professeure de philosophie. Et, disons-le tout de suite, elle est très jolie !
Elle est diplômée de l’IEP de Paris. Elle vit trois ans en Argentine, à Buenos Aires, où elle étudie à l'université Torcuato Di Tella puis à Mendoza, où elle travaille en tant que journaliste pour le quotidien régional Ciudadano Diario.
Passionnée d'éthique animale, elle reprend des études de philosophie en France à l'université Paris-Nanterre et obtient les félicitations du jury pour son mémoire de recherche sur la question de l'expérimentation animale comme mal nécessaire. Elle enseigne actuellement la philosophie au lycée et collabore à Marianne et Philosophie magazine.
Dès 2011, elle commence à militer activement pour la protection animale aux côtés de diverses associations.
Elle décide alors de commencer une enquête sur l'expérimentation animale en France, une grande partie de son enquête sera publiée en septembre 2015 dans l'essai « Profession : animal de laboratoire » qui contribue à relancer dans les médias le débat sur l'expérimentation animale.
En octobre 2016 elle fonde l'association Animal Testing pour poursuivre les enquêtes et diffuser de l'information sur les animaux de laboratoire qui révèle pour la première fois les images de singes utilisés pour des expériences dans le sous-sol d'un hôpital parisien, etc.
En 2022 paraît son troisième essai, « De l’or dans la tête ! Repenser l’éducation pour réparer l’école », une enquête sur l’évolution de l’école et les failles actuelles du système éducatif français (j’ai mon petit-doigt droit qui me dit « Ce livre pourrait plaire à ton éclaireur qui rouspète contre l’Éducation Nationale ! » mais mon petit-doigt gauche corrige « Mais non, ce ne sont certainement pas ses valeurs ! »). Audrey alerte sur le manque de maîtrise du français par les élèves, les difficultés à éveiller leur esprit critique, et sur la reproduction sociale induite par un système inégalitaire et peu exigeant…
La même année parait « Montaigne, Kant et mon chien ». Où l'auteure relate les enseignements que le (son) chien transmet à son compagnon humain, en mêlant le récit à la philosophie.


Nous y voilà. Dans « Son odeur après la pluie » le compagnon humain d’Ubac (je ne peux plus employer le terme de « maître ») observait son chien avec les yeux de l’amour et vivait en osmose avec lui, lui parlant comme à un ami, le prenant tel quel, sans explication. Qu’elle importance qu’Ubac soit comme tous les chiens ou exceptionnel ? Pour son compagnon il est unique et merveilleux !
Audrey aussi aime passionnément sa chienne Mélodie mais elle l’observe en éthologue, rend compte de son comportement à la lumière de postulats philosophiques, tels que :
La répétition : « …le chien aime les habitudes, les vôtres, et prend très vite des marques et des repères qui fondent un certain amour du quotidien » (23) Avec un chien, on prend alors conscience de tout un pan du réel que l’on ne voyait plus, il devient un philosophe de l’habitude, montrant un autre visage de celle-ci, pour la vivre différemment.
La sieste : À regarder son chien dormir en toute quiétude, pendant de longues heures, dans la journée, alors que nous nous agitons au travail, on finit par se demander si « Toute cette agitation humaine, toute cette occupation n’est alors que le fruit d’un désir de ne pas affronter qui nous sommes, ce que nous pensons, ou simplement pourquoi nous faisons ce que nous faisons. » La lucidité du chien donne une leçon : « lui n’a pas besoin d’une contenance ni d’illusion à poursuivre. Il est pour lui-même et par lui-même. » (33)
Le jeu : Sous son apparente futilité, le jeu est essentiel. Pour l’enfant, comme pour le chien, le jeu est une activité sérieuse où « Les notions d’interdit, de triche, de sanction et de récompenses y sont éprouvées. » (41)
Le toucher : Le chien nous invite à le toucher et à utiliser ce sens bien plus que nous ne le ferions sans sa présence : Récemment je me présentais devant ma boulangerie habituelle où une dame prenait son petit déjeuner, en terrasse, en compagnie de son chien, un superbe Berger australien, me voyant arriver, il s’est levé et est venu à ma rencontre pour me saluer, glissant sa tête dans ma main pour recevoir une caresse. Quelle spontanéité admirable ! Quel contact merveilleux ! Si les humains avaient ce type de comportements les relations seraient d’un tout autre ordre. « Le toucher, sens de la réalité, fait l’éducation des autres sens. » (J. Lagneau) « Celui qui se contente de voir reste à distance, ne se saisit pas du monde comme celui qui le touche, qui entre en contact… » (51)
L’instant présent, la constance, la fidélité, la joie, l’honnêteté, etc. La liste est longue de ce qu’il sait transmettre, en plus de son amour inconditionnel pour celui qui l’accompagne.
Schopenhauer ne s’y est pas trompé : « Je ne m’étonne pas qu’on calomnie les chiens : – trop souvent hélas ! L’homme n’a qu’à rougir devant le chien. » (109)
Un livre lumineux et paisible, malgré les péripéties domestiques de l’auteure – mariage, divorce, déménagements, installations intercontinentales, naissance… – qui a pu traverser toutes ses épreuves grâce à la présence constante et rassurante de sa chienne « Plus qu’une amie, ce fut une partenaire de vie, un copilote. Et lorsque j’avais enfin trouvé ma voie et que j’étais installée dans ma vie, elle s’en alla, sans doute parce que sa mission était accomplie. […] L’amour inconditionnel a un prix, celui que l’on appelle l’art de perdre. »

Philou33
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le 13 sept. 2023

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