Clarissa Dalloway a épousé Richard Dalloway ; mais alors que débarque à Londres un amour de jeunesse, Peter Walsh, qu'elle a repoussé il y a des années, les doutes l'assaillent. Alors qu'elle doit organiser une soirée mondaine le soir même, les questions et les crises s'enchaînent tandis se déroule cette journée où une multitude de personnages se croisent dans un Londres omniprésent, avec leurs problèmes à eux et leurs propres doutes.
On va finalement passer d'un personnage à l'autre, et ce même si Clarissa reste le personnage central vers qui tout semble converger ; comme par des sauts de puce successifs avec une narration construite sur des monologues intérieurs, permettant de mettre en exergue les cheminements de pensée et les retours vers le passé qui se font dans l'esprit des protagonistes.
Qui de souffrir de mauvais choix, qui de sombrer suite à un décès d'un ami à la guerre, qui de se sentir impuissante devant une relation qui s'étiole, qui de voir s'ébrouer les gens de la classe supérieure sans en faire partie, qui de ne pas encore avoir sa place en tant qu'individu propre... La liste est bien plus longue qu'il n'y parait, et si des personnages semblent avoir plus de place que d'autres, aucuns ne sont totalement laissés de côté. Il y aurait presque un effet de roman choral, en opposition avec le titre de l’œuvre.
Quoiqu'il en soit, au delà de cette structure intéressante, il y a cette façon unique d'écrire l'introspection que j'avais déjà apprécié chez Virginia Woolf dans son roman "Les Vagues", où même quand tout devient presque abstrait tant les sensations prennent le pas sur les faits et le récit même, les mots sont tellement beaux, le phrasé devient tellement magique, que le lecteur devient boulimique le temps d'une page, les enchainements le poussent à lire avec une espèce de délectation provoquée par ce style unique. Ensorceleuse Virginia Woolf qui nous décrit la naissance de la folie, le poids du passé, avec toujours cette mélancolie contagieuse qui en deviendrait dangereuse.
La littérature peut-être tellement belle dans des mains si expertes, tellement addictive, puissante pour transmettre les pensées de multiples personnages qui semblent être des facettes de son auteure.
Décrire l'instant à travers non pas les yeux, mais les ressentis, les pensées voir le subconscient des ses propres personnages, voilà tout le travail abattu par une femme de génie avec ce Mrs. Dalloway.