Quel étrange roman que celui qui divise notre opinion en plusieurs faisceaux qui s'opposent !
La qualité littéraire est là, indéniable. La narration dense, ramassée. Quelques jours, plus de six cent pages. Des personnages austères et lumineux à la fois. Terrifiants et intrigants. Complexes.
Comme je l'exprimais à mes comparses de lecture commune, j'ai été très partagée (et non mitigée) parce que le récit en lui-même m'a séduite mais Orhan Pamuk n'a pas réussi à me toucher dans le traitement des sentiments liants les protagonistes principaux. Cela donne une lecture tout en contrastes.
En ce qui me concerne, il s'agit d'un roman monochrome. La neige est omniprésente, comme le titre l'annonce. Elle recouvre toute la ville-frontière de Kars, au fin fond de la Turquie orientale. Là les destins se croisent et s'écrasent, dans des mouvements terroristes paralysants. le combat fratricide entre les républicains et les Islamistes fait rage, les femmes en sont les premières victimes.
Ka, le héros, est un poète turc exilé depuis plus de dix ans en Allemagne et qui revient au pays sous couvert de reportages, mais en réalité il est en quête d'inspiration, notamment à travers sa quête d'un amour partagé avec la belle Ipek. Bien que ce roman se déroule sur le théâtre de la ville, il s'agit d'un huis-clos, tout bruit étant étouffé par la neige ininterrompue. Ce symbole de pureté se heurte à la noirceur des actions humaines.
Enfin, ce que je retiendrai de cette lecture exigeante, au rythme lent et irrégulier, sera le fait que malgré son titre, ce roman m'est apparu dans mon imaginaire de lectrice comme entièrement noir. J'avais beau me représenter cette neige si bien décrite, je ne plaçais l'action que dans un environnement nocturne. Une vraie bizarrerie.
Orhan Pamuk n'est pas un auteur nobelisé pour rien. La plume, le style, le contenu, tout désigne un grand écrivain ; un talent qu'en toute modestie, je doute de pouvoir pleinement apprécier à sa juste valeur.