Un de ces soirs moroses d’automne qui accablent l’âme, je me couchai après pris presque par hasard, ou bien sous l’effet de quelque fatalité mystérieuse, un recueil de Buzzatti. Sous son apparence quelconque, un livre de poche destiné à un public scolaire et qui le rapproche plus d’un objet de consommation que d’une production littéraire, je fus immédiatement fasciné par ma lecture, comme s’il se fût agi d’un grimoire dont les étranges hiéroglyphes devaient me révéler d’insondables mystères. Dès les premières lignes, au milieu des ombres vacillantes de la nuit, je sentis confusément que ma vie ne serait plus jamais la même…
Mais, en fait, non. C’est une lecture plaisante que celle de cette petite anthologie, mais qui marque peu. L’atmosphère fantastique est peu développée. La morale de ces nouvelles, qui prennent souvent la forme d’apologues, n’a rien de renversant. En revanche, j’y ai apprécié l’art du conteur, car Buzzatti sait admirablement créer une atmosphère spécifique en quelques touches, et ne se départit pas d’une écriture un peu détachée, où pointe souvent l’humour.