Je ne sais plus très bien qui tenait à peu près ce langage : "Le thème de l'oncle Vania, c'est le thème des "petits de ce monde" dont la vie est sacrifiée au bonheur d'autrui, à un bonheur indigne, à un but faux, à un faux-dieu, c'est le thème d'une beauté qui se perd inutilement, détruite par la mauvaise force qui exterminait tout ce qu'il y avait de beau sur terre." ; Mais il me semble que l'on n'aurait pas pu mieux résumer une telle pièce.
J'ai toujours pensé qu'on décelait un grand écrivain à sa vision de la banalité. Si j'ai raison alors Tchékhov se place haut parmi les dramaturges. Son théâtre n'est fait que de Monsieur et Madame tout le monde, de scènes de la vie quotidienne, de petits riens ... Et pourtant, quand on y entre, on ne peut qu'avoir cette impression de tomber dans un puit sans fond, où 100 lectures ne suffiraient pas à tout sonder.
Les pièces de Tchékhov sont des mondes à eux-seuls où quelques thèmes reviennent inlassablement. La beauté en premier lieu. Celle unanime qui détruit tout qui n'est visible que par les yeux et paralyse le reste des sens ; qui empêche la contemplation de l'autre beauté, celle pourtant créatrice, celle de l'âme. Le parallélisme des personnages semblent aussi une récurrence chez Tchékhov. Celui de Helena et de Sonia, évidemment mais surtout celui de l'oncle et du médecin. A la fois éclairés et aveuglés sur leurs situations, l'un est désespéré, l'autre irrité. L'un en colère, l'autre indifférent.
Difficile de dire quel est le personnage principal de la pièce. Le titre pourrait être éponyme. Beaucoup pourrait pencher malgré tout sur le docteur. Si j'en ai le droit, mon idée est que le vrai personnage principal est celle qui a le dernier mot, la plus sage, . Celle qui est la vrai beauté du livre, qui a pour oncle Vania, la petite Sonia.