Après Meurtre aux chandelles, un premier roman qui annonçait assurément une belle série, Gyles Brandeth récidive en mettant une nouvelle fois en scène Oscar Wilde et d'autres personnages de son entourage, notamment sir Arthur Conan Doyle, le créateur de Sherlock Holmes, Bram Stoker, celui de Dracula et le peintre Walt Sickert, un peintre impressionniste soupçonné un temps d'être Jack l'Eventreur. Fortement influencées par les enquêtes du détective de Baker Street, celles d'Oscar Wilde bénéficient également d'un narrateur-acolyte, à savoir le poète Robert Sherard, ami proche de l'auteur du Portrait de Dorian Gray qui, dans un style plus poétique et moins clinique nous présente non seulement l'intrigue en cours, mais également l'illustre écrivain qui nous guide. Cela permet au lecteur de découvrir un personnage hors du commun, à la fois dandy et esthète, homme de génie et individu aux mœurs controversés. C'est en plongeant dans sa vie privée que démarre cette nouvelle aventure. Alors qu'il réunit, comme chaque mois, des amis et des connaissances au Club Socrate, son fameux club privé, il invite tout ce petit monde à jouer au "Jeu de la mort" qui consiste à écrire sur un morceau de papier le nom de la personne que l'on désirerait voir mourir. Mais ce qui n'était, au départ, qu'un jeu, tourne vite à la tragédie lorsque les deux premières personnes de la liste sont découvertes mortes et que l'on sait que les noms d'Oscar et de sa femme sont en fin de liste.
Mené de manière brillante, ce deuxième roman est un vrai bonheur de lecture pour tous les amateurs d'Oscar Wilde, de cette époque et de Sherlock Holmes, tant l'auteur, en vrai connaisseur, s'est amusé à mêler des faits historiques, des anecdotes intimes et des éléments de sa création sans jamais nous montrer les fils qui les lient. Cela donne une intrigue cohérente, racontée avec intelligence par un narrateur auquel on croît d'un bout d'un l'autre, jusque dans son attirance pour la femme d'Oscar et sa jalousie vis-à-vis des autres hommes qui l'approche. Gyles Brandeth laisse percer une réelle humanité et un amour profond pour ses personnages, nous offrant de belles pages de lecture qui trouvent leur acmé dans un match de boxe soigneusement raconté. On se rêve aux côtés de Wilde, Conan Doyle, Stoker ou Sherard. On s'imagine au Club Socrate à boire jusqu'à plus soif. On s'invite à la table du petit-déjeuner composé de harengs et arrosé de vins blancs. On suit même en calèche, les allers et venues d'un Oscar Wilde qui n'aime pas faire des efforts. Avec Le Jeu de la mort, Gyles Brandeth signe un roman subtil, envoûtant et bien construit dont on ne peut se détacher jusqu'à la révélation finale.