C'est vrai ici (dans ce roman et en France) et c'est vrai là-bas.
Expliquons nous.
Gaël Faye nous raconte sa tendre enfance dans une impasse (riche mais ça ce n'est pas vraiment précisé) de Bujumbura, fils d'une rwandaise exilée et d'un français expat.
Et son père, enfant lui dit qu'il ne faut pas se mêler de politique, sage attitude quand on est un expat blanc (où toute attitude peut être interprétée à dessein comme un geste colonial), mais moins avérée quand on est né à l'endroit concerné.
Et donc toute la petite famille reste à l'écart le plus longtemps possible du drame qui va secouer le Rwanda et par contiguité le Burundi durant cette sombre période des années 90.
Comme indiqué dans mon titre, l'auteur fait oeuvre d'une innocence presque coupable de ne raconter que sa vie (peut-être est-ce une volonté éditoriale), en effet du coup, l'ouvrage est facile à lire et terriblement à la mode (ça sent bon l'humilité), aucune mise en perspective historique n'est jamais faite, aucun lien entre politique et société n'est jamais établi alors qu'il y avait tellement matière à nous faire philosopher avec des personnages à l'allégorie qui semblait toute trouvée : le père comme observateur extérieur impuissant, la soeur dans le déni, la mère brisée et déchirée par la folie du génocide (je crois que le mot n'est même pas employé dans tout le roman) et enfin Innocent, celui qui se fait contaminer par ce poison sanguinaire.
Le roman est agréable à lire et même assez bien écrit, mais sur ce qui aura conduit à ce drame, on n'en sait toujours pas plus et c'est bien regrettable car cela stérilise toute valeur intellectuelle, d'autant qu'il nous raconte passer pas mal de temps avec sa voisine Mme Economoupolos, sorte d'érudite détachée du contexte, aucun enseignement n'est donc ressorti de ces lectures?
Il y a tout de même un personnage qui fait un peu exception, c'est Pacifique qui raconte avec sa tante Eusébié comment les extrémistes excitent les velléités génocidaires (via notamment la tristement célèbre radio des mille collines non mentionnée), mais ce n'est qu'à peine quelques pages et c'est trop peu.