Les fidèles d'Alain Mabanckou, en particulier ceux qui ont apprécié Verre cassé ou Mémoires de porc-épic, retrouveront dans Petit piment le "réalisme magique" de l'écrivain congolais. Tout du moins dans les deux premier tiers du livre qui content tout d'abord le quotidien dans un orphelinat des années 60, où la vie est encore relativement supportable grâce à l'enseignement d'un religieux bienveillant mais beaucoup moins agréable quand sont appliquées les règles contraignantes et rigides de la révolution socialiste. Petit piment s'enfuit alors et devient un gosse des rues de Pointe-Noire que Maman Fiat 500 (comprenez une tenancière de bordel) prend sous son aile. Mais notre héros ne sera pas heureux longtemps ... Sans devenir académique, le style de Mabanckou s'est affiné au fil des livres et cela permet au récit picaresque de donner toute sa sève tout en restant réaliste et un peu moins "magique" que dans les deux romans cités plus haut. Le livre est dans sa presque globalité un vrai délice avec ses anecdotes rocambolesques mais il dresse aussi un portrait imagé d'un pays divisé par les ethnies et rongé par la corruption. Mais quand Petit piment finit par dériver aux frontières de la folie (aux 2/3 du livre, donc), la rupture de ton est radicale et la narration, jusqu'alors limpide, devient heurtée et s'égare quelque peu. Une impression qui va hélas en grandissant vers le dénouement du roman. Ce sentiment est forcément subjectif et certains lecteurs y trouveront peut-être leur compte. Quoi qu'il en soit, 2/3 de bon Mabanckou c'est un bonheur que l'on retrouve pas dans beaucoup de livres. Loin de là.