S'il ne figure pas parmi les romans les plus célèbres ni les plus brillants d'Agatha Christie, "Poirot joue le jeu" fait néanmoins partie des belles réussites de la Reine du crime.
En effet, l'idée de départ est prometteuse, l'intrigue se met en place avec fluidité, et la résolution est à la fois crédible et surprenante, ce qui reste le critère primordial d'un bon roman d'énigme.
L'aide du fameux détective belge est ici réclamée par son amie Ariadne Oliver (auteur de romans policiers et double déjanté d'Agatha Christie), elle-même chargée d'organiser une "course à l'assassin" dans une fête de village, sorte de chasse au trésor en version macabre.
L'excentrique romancière a le pressentiment que quelque chose de louche se trame dans son dos, et convainc Poirot de la rejoindre dans le Devon, sous le prétexte de remettre un prix au vainqueur, mais surtout pour ouvrir l'œil. Làs, le petit détective moustachu ne pourra empêcher qu'un crime soit bel et bien commis...
Les différents protagonistes de l'intrigue sont joliment caractérisés, à l'image du nobliau campagnard ou du cousin navigateur, quoi qu'un peu nombreux (certains n'ont pratiquement aucune utilité), et on prend véritablement plaisir à suivre l'enquête de Poirot, entre fausses pistes et révélations. Comme souvent chez Christie, il sera question de secrets inavouables, de liaisons coupables et d'usurpation d'identité.
Rien de follement original donc, mais les ingrédients qui font un bon whodunit, d'autant qu'Agatha Christie esquisse en creux un portrait de la société anglaise d'après-guerre, évoquant ça et là les grands changements sociétaux présents et à venir, soulignant par exemple la perte de prestige des titres aristocratiques au profit de la puissance financière.