Dans ce roman autobiographique publié en 1916, James Joyce raconte son enfance à Dublin en la personne de Stephen Deadalus. Le titre est évocateur, c’est bien de la naissance de la vocation littéraire de Joyce qu’il est question au fil des pages. Il y raconte son éducation chez les jésuites, une communauté très religieuse envers laquelle le jeune Deadalus se révoltera. Pour s’échapper de ce monde, Stephen utilise l’art et la poésie en particulier. Ainsi, nombreuses sont les références poétiques au sein de l’oeuvre qui guideront le jeune homme. En revanche, le monde religieux des jésuites se referme petit à petit sur le personnage, et malgré sa tentative de révolte, il ne s’en échappe jamais. Certains passages mettent en scène le jeune homme tourmenté, qui se remet en question et aux prises des autorités morales et religieuses. On sent en effet la prise de l’archaïsme et de l’église catholique sur l’Irlande du XIXème siècle que peint James Joyce dans cet ouvrage. Au début de l’oeuvre, on retrouve Stephen enfant, fréquentant un collège catholique et de réputation sévère. On sent des accents dickensiens dans ces passages « d’enfants à l’école » rejeté dans l’intégration en tentant de s’échapper du système. Il est important de mentionner la maitrise avec laquelle Joyce manie le courant de conscience (Stream of consciousness) qui ancre le récit ainsi que le personnage dans un réalisme quotidien et intérieur. Le personnage prend vie grâce aux livres, tout comme l’auteur prend vie grâce aux mots, grâce à ses souvenirs d’enfance. Cette façon de jouer avec le langage que l’on connaît bien chez son roman le plus fameux « Ulysse » se préfigure dans ce premier succès pour l’auteur, un ouvrage qui annonce des éléments importants de la création artistique de Joyce.