Publié sur L'Homme qui lit :


Nos sociétés occidentales, fortes de leurs richesses, ont érigé de véritables temples pour célébrer leur amour de la consommation : les supermarchés. Dans ce petit livre, première publication de la collection Raconter la vie (filiale des éditions du Seuil), Annie Ernaux raconte sous une forme originale, à mi-chemin entre le journal intime et le carnet de voyage, ses expéditions hebdomadaires dans son hypermarché Auchan du centre commercial des Trois Fontaines à Cergy, en banlieue parisienne.


L’apprentie sociologue s’interroge sur ce que l’on voit nous aussi lorsque nous faisons nos courses, mais avec un regard curieux, parfois critique, souvent amusé. Aussi, dans ces grandes églises du bien à consommer, égratigne-t-elle l’agencement du magasin, qui cache à côté du rayon dédié aux animaux de compagnie, celui du discount, qui sépare ceux ayant du pouvoir d’achat de ceux qui n’en ont pas assez.


Ces grandes surfaces vivent à une allure effrenée, le client doit aller vite, ne pas traîner dans les rayons, rien ne doit ralentir sa course. Aussi est-on amusé lorsqu’elle nous parle du rituel du passage en caisse : quelle caisse semble avancer, cette caissière est-elle assez rapide, va-t-elle me faire perdre une minute ? Va-t-on me juger parce que j’ai mis tel ou tel article sur mon tapis, va-t-on me cataloguer, me classer dans telle ou telle caste ? Quid de ces caisses automatiques, où le client est seul face à la machine, perdant le dernier contact humain qui lui restait dans cet univers dédié au bonheur d’acheter ?


Suivre Annie Ernaux au fil des pages et de ses réflexions est délicieux et salvateur, on s’interroge avec elle sur notre dépendance à ces hypermarchés et sur nos comportements lorsque nous y sommes. Pari réussi pour cette belle collection pleine d’humanité qui veut "contribuer à rendre plus lisible la société d’aujourd’hui et à aider les individus qui la composent à s’insérer dans une histoire collective".

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le 8 mars 2016

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Brice B

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