La rencontre de la peinture et de la littérature. En ces temps de confinement où la frontière entre le dedans et le dehors n'a jamais été aussi marquée, comme dans les tableaux si visionnaires du génial Hopper (mort en 1967), cette anthologie présentée par Alain Cueff rassemble des nouvelles et des essais d'écrivains américains qui repensent la solitude et le couple dans des décors à l'atmosphère cinématographique tout en clairs-obscurs.
Paul Auster livre ici un extrait de son roman Moon Palace où son personnage va faire l'expérience volontaire d'un processus de clochardisation et de désocialisation, où il va tenter de trouver un sens à sa vie en se réfugiant dans Central Park, forme de retour à l'essentiel, au plus proche de la nature.
Norman Mailer nous livre une nouvelle noire dans laquelle son personnage va être victime d'un gang d'arnaqueurs de billard, après qu'ils l'ont pris en stop pour se rendre à Chicago. Les rencontres nocturnes où les solitudes se nouent sont le lieu de drames et rappellent l'atmosphère du célèbre tableau Nighthawks.
Dans son essai, Leonard Michaels évoque l'histoire des personnages croqués par Hopper et tente de déceler leurs pensées intimes : "les tableaux de Hopper nous font entrevoir ce que penser veut dire"...
Ann Beattie prend pour personnage de sa nouvelle le Hopper des campagnes, celui qui vivait reclus à Cape Cod la moitié de l'année pour mieux observer le monde, à distance, et le titre, Cape Cod Evening, rappelle la toile de Hopper qui figure un chien devant un couple sur un porche dans la lumière crépusculaire, annonçant la fin de l'été, et, sûrement, la guerre.
Force est de constater que l'univers de Hopper, dont les lieux liminaux sont centraux (portes, fenêtres, maison de campagne) a inspiré une génération d'écrivains qui restituent avec leurs mots les vies ordinaires d'êtres ordinaires, dont les pensées étaient rendues insondables par le talent de Hopper.

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le 19 avr. 2020

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