Je n'attribue pas une note excellente à ce livre parce que j'ai déjà beaucoup lu sur les thèmes abordés (homosexualité, la sociologie du vote FN, les déterminismes sociaux, etc.). Je n'ai donc pas appris grand chose mais c'est quand même toujours agréable de lire une critique de la méritocratie par exemple. Je conseille néanmoins ce livre car il peut être une excellente approche pour ces sujets, abordés avec sérieux mais de manière souvent claire.
L’élimination scolaire passe souvent par l’autoélimination, et par la revendication de celle-ci comme s’il s’agissait d’un choix : la scolarité longue, c’est pour les autres, ceux « qui ont les moyens » et qui se trouvent être les mêmes que ceux à qui « ça plaît ».Le champ des possibles – et même celui des possibles simplement envisageables, sans parler de celui des possibles réalisables – est étroitement circonscrit par la position de classe.
C’est l’ordre des choses, voilà tout. Et l’on ne voit pas comment fonctionne cet ordre, car cela nécessiterait de pouvoir se regarder soi-même de l’extérieur, d’adopter une vue en surplomb sur sa propre vie et sur celle des autres. Il faut être passé, comme ce fut mon cas, d’un côté à l’autre de la ligne de démarcation pour échapper à l’implacable logique de ce qui va de soi et apercevoir la terrible injustice de cette distribution inégalitaire des chances et des possibles.
Wideman nous oblige donc à admettre ceci : le fait irréfutable que certains – nombreux, sans doute – s’écartent des voies « statistiques » et déjouent la terrible logique des « chiffres » n’annule en rien, comme voudrait le laisser croire l’idéologie du « mérite personnel », la vérité sociologique révélée par ceux-ci.
Les enseignants font de leur mieux ! Mais ils ne peuvent rien, ou si peu, contre les forces irrésistibles de l’ordre social, qui agissent à la fois souterrainement et au vu de tous, et qui s’imposent envers et contre tout.
L’influence que cette amitié exerça sur moi et l’aide que, sans s’en rendre compte, ce garçon m’apporta furent néanmoins déterminantes : mon habitus de classe me portait, au début, à résister à la culture scolaire, au type de discipline qu’elle exige. J’étais turbulent, indocile, et il s’en serait fallu d’un rien pour que des forces irrésistibles me conduisent à dériver vers un refus complet. Lui, c’était le contraire : la culture était son monde, depuis toujours.