Découverte de Shakespeare - Acte II

Comme je l'avais expliqué dans ma critique de MacBeth (le mec qui fait s'auto-paraphrase), j'ai une méconnaissance majeure de Shakespeare. J'ai donc décidé, pour y mettre fin, de lire 5 pièces majeures du célèbre dramaturge britannique. A partir de cela, je souhaite jeter un regard neuf, sans prétention, m'attardant sur l'aspect amateur et néophyte de mon jugement avant tout. Essayer de saisir, par mon expérience personnelle, comment l'on « découvre » Shakespeare.
Le but n'est pas donc de donner une critique qui tentera de justifier pourquoi Shakespeare est le plus auteur anglais. Ou alors, d'une façon plus intimiste, de voir comment l'oeil neuf réagit à la découverte de ces pièces.
Alors que le prologue avait été Roméo et Juliette et Le Viol de Lucrèce (mais sans critiques car lectures anciennes) et que l'acte I avait été pour MacBeth, il est temps de passer à l'acte II avec la quatrième pièce historique de Shakespeare, j'ai nommé Richard III.


Suite à Henri VI (que je n'ai bien sur, pas lu), Edouard IV, à la santé fragile, est roi d'Angleterre. Mais son frère, le vil Richard, duc de Gloucester n'entend pas se limiter à d'être qu'un personnage secondaire. Il est bien décidé à tout mettre en œuvre pour devenir roi d'Angleterre. Un choix qui n'est pas tant dicté par l'amour du pouvoir que par le vice pur et la haine du monde. Parce qu'il est laid, parce que la nature a été injuste envers lui, Richard fera de l'injustice sa devise.
La pièce se place dans un contexte politique complexe, que j'ai eu un peu de mal à saisir mais qui n'a rendu la lecture que plus appréciable. En effet, la Reine Marguerite, la veuve d'Henri VI, le précédent roi, est encore présent. De même que Lady Anne, la veuve d'Edouard, le fils d'Henri VI. Tous les deux ayant été assassiné par Richard. Mais, à côté de cela, la Reine Elisabeth, femme d'Edouard IV, profite de son influence pour faire monter en grâce certains de ses proches et les fils de son premier mariage tandis qu'elle éloigne du pouvoir ses ennemis. Ainsi, elle a envoyé à la Tour de Londres, Lord Hastings.
C'est dans ce contexte complexe que la pièce commande, Richard, malin au possible, va profiter des différentes discordes. Au vu de l'état de santé du roi, il ne reste à Richard qu'à supprimer tous les potentiels candidats au trône, mais aussi, éliminer ceux qui pourraient s'y opposer. C'est le début, pour Richard, d'une suite de meurtres sans nom.
Notons son coup de maître : Georges, duc de Clarence, son propre frère. Emprisonné par Edouard IV suite aux conseils de Richard, ce-dernier fera assassiner le duc de manière à ce que Edouard se sente coupable, achevant le roi par le chagrin et le condamnant à mourir dans les minutes qui suivirent. Ô génial Richard, tu as éliminé le roi et ton plus dangereux prétendant. Il ne reste plus qu'à faire de même pour tes neveux et ceux qui pourraient vouloir les protéger.
Cette pièce grandiose voit le couronnement de Richard arriver à la fin de l'acte III, suite à des manipulations géniales. Le dernier tiers du récit offre donc un Richard roi, qui devra repousser les rebelles de Henri, comte de Richmond, que l'histoire retiendra comme le futur Henri VII.


Cette pièce est d'une beauté inouïe, c'est l'évidence. Je vais surprendre plus d'un lecteur, à mon avis, car je suis, sommes toute, totalement néophyte avec Shakespeare, mais je l'ai largement préféré à Macbeth, trouvant Richard III bien mieux développé dans plusieurs propos.
Comme Macbeth, la poésie du mal est là, mais à un autre niveau. Comme Macbeth, il y a un roi machiavélique et tout puissant qui doit combattre des rebelles et répondre de ses crimes. Comme Macbeth, il y a des esprits vengeurs. Comme Macbeth, il y a des malédictions qui s'abattent.
Mais je l'ai préféré à Macbeth, déjà parce qu'elle est plus longue. Mais surtout parce qu'elle est sans concession. Le génie de Richard dégouline de sa présence, sa maîtrise de la langue est parfaite et les joutes verbales, nombreuses, sont grandement maîtrisées. Il y a, avec Richard III, un amour du mal pur, du mal pour le mal et un personnage parfaitement maléfique qui ne semble jamais caricatural. Quand bien même, au cours de l'acte V, il perd en capacité d'impressionner, il retrouve sa verve à la fin et surtout, meurt en héro. Sa dernière réplique deviendra légendaire « mon royaume pour un cheval ». Richard ne meurt pas en lâche qui voudrait fuir, qui abandonnerait tout pour survivre. Richard meurt en s'imposant d'exister, il est prêt à tout abandonner pour continuer le combat, pour imposer son existence. Le monde le rejette car il l'a rejeté. Mais qui a commencé ? Qui a balancé au visage de l'autre tant de haine ? Richard sait qu'il est coupable, il sait aussi qu'il était victime à la base, mais tout cela n'a guère d'importance. Il s'impose, il détruit désormais.
La bataille finale, le regain de puissance de Richard III peut presque sembler être un discours athée. Alors que Dieu soutient Richmond, Richard lui assume sa condition d'homme, renonce à toute forme de société, de pouvoir, de puissance, si ce n'est son droit d'exister, son droit de détruire.


Et si seulement, Richard III n'était que ça. Car il y a toute une galerie de personnages secondaires particulièrement réussis et complexes.
Je sais que Macbeth est ultérieur, mais je ne peux m'empêcher d'y voir une version plus puissante de par la complexité des personnages, des intrigues. La pluralité des visages, des vocations. Pluralité de masques pour ce qui est de Richard qui rend clairement le personnage d'une rare excellence.
Richard III m'a ému par la beauté de sa langue, à un niveau si élevé que c'est à peine croyable. La beauté de son récit, de son scénario, de sa narration, des choix des scènes, est extrêmement touchante aussi. Mon regret fut une faiblesse à partir de l'acte IV jusqu'au milieu de l'acte V à mon goût.


Notons également un gros regret très personnel : j'ai lu Richard III en 4 jours car j'étais très occupé à côté. Ca m'a dérangé, et j'imagine vraiment que mon plaisir aurait été plus intense si je ne l'avais lu qu'en 2 jours.


Richard III, un ode au mal, ou à la beauté ?

mavhoc
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le 29 mars 2015

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