L'écriture de Nathacha Appanah est toujours aussi belle. L'accès à Rien ne t'appartient n'est cependant pas si évident, avec cette femme qui perd le sens de la réalité et revoit les fantômes de son passé avant de rejoindre l'ombre. Il n'y a que peu de moments de bonheur dans cette histoire divisée en deux parties, le parcours de vie d'une orpheline qui deviendra veuve et affronte un tsunami dans son pays natal déchiré par la guerre (le Sri Lanka ?). Le splendide style de la romancière d'origine mauricienne aide à combler les trous narratifs même si on peut se poser la question du choix de l'écrivaine de ne retenir pratiquement que la permanence du malheur dans ce destin d'une héroïne qui portera deux noms différents, comme pour marquer la fracture entre deux pans d'existence. Rien ne t'appartient est d'une tristesse absolue, d'une noirceur presque constante, avec quelques éclaircies heureuses mais Nathacha Appanah a décidé de privilégier le côté sombre d'une vie, sans doute comme un hommage à toutes celles qui ont été victimes de la folie et de la violence des hommes, qui transforment le paradis insouciant de l'enfance en un enfer cruel. L'écriture élégante, sensuelle et sinueuse de l'autrice est un régal, comme elle l'était dans Tropique de la violence ou Le ciel par-dessus le toit. Rien ne t'appartient est peut-être un ton en dessous mais c'est une affaire d'appréciation personnelle et ne remet pas en cause l'intérêt porté à cette romancière sensible et sensorielle.