J'ai tout de suite été déroutée par le style et il a continué à me courir sur les nerfs toute la lecture durant. Les expressions orales, les sarcasmes permanents, les interpellations du personnage au lecteur sont plus percutantes quand elles sont utilisées avec parcimonie. Là, c'est juste lourd. Une partie de cette lourdeur est imputable à la mauvaise traduction (on a quand même un traducteur qui nous explique à un moment, en note de bas de page, qu'il n'a pas vérifié la signification des sigles, mais qu'ils ont l'air corrects d'après une vidéo youtube dont il nous donne le lien !). Bref, ça donne un caractère complètement je-m’en-foutiste au héros, qui rate l'occasion de nous décrire une seule fois la sensation de solitude sur Mars... C'est con quand même. Au bout de deux ans, ça doit être un enfer psychologique. Mais ce type-là a un moral en acier et une humeur en béton jusqu'à la fin : ça ne le rend pas humain, c'est dommage.
Il n'y a aucun mot sur son histoire personnelle, non plus. Il nous évoque une ou deux fois "sa famille" en passant et on ne sait pas s'il pense à eux, s'ils communiquent, s'il a le bourdon... Heureusement qu'Hollywood lui a rajouté une jolie femme et un adorable petit garçonnet dans le film.
Par contre, la crédibilité de ses aventures et les centaines d'explications techniques m'ont brossée dans le sens du poil et l'aspect thriller est réussi. Au bout d'un moment, on ne peut plus lâcher le bouquin. L'alternance entre le journal de bord de Mark sur Mars et les opérations d'urgence organisées à la Nasa est bien fichue. On se croirait dans Apollo 13 puissance dix. Les rebondissements sont cools, les accidents sont cools et on ne sent jamais d'acharnement gratuit contre le héros, ni de deus ex machina d'ailleurs. S'il s'en sort, c'est toujours après trois jours de réflexion, des idées, des essais, des erreurs. Ça, j'adore.
Avant de lire le bouquin, rien que pour le concept, j'avais envie de lui mettre 10. Je voulais tellement qu'il devienne un chouchou de ma bibliothèque, mon petit bonbon de l'espace... Mais si Andrew Weir est un gros geek très doué en scénarios de missions spatiales, il ne sait manifestement pas encore donner de l'âme à ses personnages, accompagner le lecteur dans sa peau et lui laisser le temps de la contemplation.
Ah, et le sexisme latent me saoule un peu aussi (quand la femme de Vogel lui écrit que son petit garçon s'est distingué par une performance sportive alors que l'événement marquant de la vie de sa fille est d'être "tombée amoureuse" d'un nouveau garçon... Quand Mark écrit à ses camarades de mission et qu'il donne des conseils de look à une astronaute pour qu'elle se mette mieux en valeur...).
Très curieuse de voir le film, maintenant.