Histoires à lire au coin du feu (de l'immeuble voisin qui s'écroule peu à peu dans ses propres décom
Silo, à bien des égards, est un cocktail réussi, un savant mélange de suspens, de complot, de technologie à la fois vitale et malsaine et de politiciens véreux aveuglés par le pouvoir de l'habitude. Je serais presque tentée de dire qu'il reproduit un schéma somme toute classique du genre post-apocalyptique, surfant sur la vague de 1984, de Logan's Run, de City of Amber, d'Equilibrium, et j'en passe. L'intérêt, donc, ne réside pas dans sa ressemblance avec les autres avatars du genre, mais dans ses particularités, dans le style qu'il utilise pour interpréter ce sujet "traditionnel": et selon mon expérience de lectrice, je dirais simplement qu'en cela Silo est une réussite.
Le principe est simple : une société réduite, vivant depuis des centaines d'années dans un cylindre enterré autosuffisant, et observant le monde extérieur par l'intermédiaire de caméras vétustes, un monde ravagé, battu par les vents, impropre à toute vie. Un monde devenu tabou, à la consistance douteuse, dont la réalité s'étiole à la cadence des pixels morts sur les écrans qui transmettent son image. La réalité, c'est le "silo", cette vaste étendue trop exiguë pour ses occupants, c'est la société cloisonnée, les rôles distribués dès la naissance, une fourmilière bien réglée qui s'emploie à faire accepter à tous un état de fait que la moindre remise en cause pourrait détruire.
On aurait pu faire plus original, certes; après, les obsessions de l'humanités tournent souvent en vase clôt, et s'expriment avec force dans les univers distopiques, reflets souvent limpides de nos peurs et de nos fantasmes intrinsèques, et la réduction du monde tel qu'on le connaît en microcosme cloisonné et contrôlé tient une bonne place parmi ces angoisses existentielles post-industrielles. Et visiblement, on ne s'en lasse pas.
Il faut dire aussi que Hugh Howey a une écriture agréable (du moins la traduction française donne cette impression), subtilement ironique; il innove sur certains points, il captive, il sait amener son lecteur à travers un fourmillement de questions pas si conventionnelles, et répond avec une parcimonie calculée qui donne envie, à chaque fin de chapitre, de continuer sa lecture, peu importe l'heure.
Personnellement, je l'ai avalé en un jour et une nuit : j'ai eu le temps de reconnaître quelques potentielles sources, de faire quelques connexions, mais surtout, de me mêler à cet univers, et de m'attacher parfois trop vite à certains des protagonistes. Et de prendre, de plein fouet, l'amertume de l'avoir déjà fini, la frustration de devoir attendre pour lire une potentielle suite (dont je viens aujourd'hui de m'apercevoir de l'existence).
C'est donc sans retenue que je vous conseille d'ouvrir ce livre, et de vous laisser entraîner : moi, je vous laisse, la librairie vient de rouvrir et le tome 2 m'attend !
Bonne lecture !