Pas facile d'avoir Roy comme patronyme quand on est romancière indienne. Malgré tout, avec Un atlas de l'impossible puis Les plis de la terre, Anuradha Roy a réussi à se faire un nom et à ce qu'on ne la confonde plus avec Arundhati Roy (Le dieu des petits riens). Sous les lunes de Jupiter, son dernier livre, se présente comme un récit choral dans une petite ville imaginaire (et sainte) au bord du golfe de Bengale. Quelques jours seulement avec une poignée de personnages dont on peut dire qu'ils n'ont pas vaincu leurs démons intérieurs, loin de là. Au coeur du livre : Nomi, en provenance de Norvège, qui est revenue sur les lieux d'un grand traumatisme d'enfance alors qu'elle vivait dans un ashram. Anuradha Roy essaie de varier les tonalités, y compris la comédie, lorsqu'elle évoque l'escapade touristique de trois vieilles dames, mais son naturel dramatique revient au galop. Sous les lunes de Jupiter est un ouvrage sombre qui parle d'innocence perdue sur fond de violences dans lesquelles la religion, ou plus exactement ceux qui s'en servent de façon pervertie, joue un rôle important. Si le livre d'Anuradha Roy ne court pas le risque de ressembler à un catalogue d'incidents ou d'événements tragiques, il n'en reste pas moins inférieur à ses deux précédents : le style est vif mais la narration est moins fluide. Il contient au minimum une ou deux intrigues en trop, lesquelles en définitive n'ont pas assez d'espace pour se développer. Une légère déception tant la romancière indienne conserve une façon toute personnelle et à l'écart des sentiers battus et exotiques de raconter son immense pays.