Il m'a fallu du temps pour comprendre que Starlight, c'est l'ado qui est au coeur d'un autre roman de Richard Wagamese Les Étoiles s'éteignent à l'aube. Je veux dire, à la lecture de Starlight, c'est déjà tellement beau et foisonnant de poésie dure qu'on se cogne un peu que ce soit une suite.
On peut donc aisément se plonger dans Starlight sans avoir lu le premier roman édité de Wagamese aux éditions Zoé. Mais je vous encourage vivement à le faire parce que c'est un texte magnifique.
Pour l'heure, Starlight a grandi, et enterre le vieil homme qui l'a élevé et qui l'a poussé à accompagner son père biologique jusqu'à son dernier souffle, sur les terres ancestrales, selon le rituel de la tribu dont Starlight et son père sont issus. Cette mort va laisser une immense solitude dans le coeur du jeune amérindien, qu'il comblera en s'échappant dans la nature et en s'appropriant les terres du vieil homme. La Nature avec un N majuscule d'ailleurs, parce qu'il lui doit tout.
Le sens de la vie, son éducation. Toute est justifié par la Nature selon Starlight. Si bien que lors de ses escapades, il emporte avec lui un appareil photo afin de capter les moments de "communion" avec cette dernière.
En parallèle, à des kilomètres de Starlight, Emmy et Winnie (mère et fille) fuient un petit ami violent affublé de son pote après une dernière confrontation, où Emmy arrive à foutre les deux hommes au sol et cramer la baraque. Elle pique le pick-up et décide de partir le plus loin possible afin de permettre à sa gosse de voir autre chose que de la violence dans la vie.
Sauf que les deux gus sont pas morts. Ils s'en sortent avec quelques points de suture et une furieuse envie de lui claquer le baigneur, à elle et à sa fille, mais tellement fort que si elles meurent ça serait tip top tu vois ?
Emmy va donc au fil de ses aventures rencontrer Starlight et venir percuter le style de vie de cet homme solitaire, qui a tellement de mal à communiquer qu'il choisit pas les mots au hasard. De plus il se sent beaucoup plus à l'aise entouré de forêts, d'animaux que de grandes villes et d'interactions sociales, sauf son pote Eugene.
On est sur du déjà vu, bien cliché, déjà exploité mille fois dans le roman américain, je vous l'accorde. Sauf que.
Sauf que Wagamese est amérindien, mais ne se revendique pas en tant que tel. Il est un fils de la Nature, peu importe l'étiquette qu'on colle à quelqu'un, pour lui on retrouvera toujours le même produit à l'intérieur. Et rien que cette perception change complètement la donne du preux chevalier qui vient à la rescousse de la pauvre meuf qu'a fait de mauvais choix dans sa vie et qui déguste depuis qu'elle est née.
Starlight se lit comme un recueil de poésie. C'est un roman court, les mots n'ont pas été choisis ni traduits pour faire bien. Ils sont consciencieux, font mouche Merteuil, enfin la grande classe quoi.
Ah ouais, y'a moyen que tu te sentes frustré à la fin minou, parce que le roman n'est pas achevé. Ça arrive quand l'auteur décède entre temps, l'histoire terminant sur un moment clé, que tu attends depuis le début.
Mais tu sais quoi enfait ? C'est même pas un problème. Tu l'acceptes tel quel parce que t'en as pour ton compte niveau émotions. T'as qu'une envie c'est d'aller crapahuter dans les arbres, dire merde à la ville et t'isoler encore plus afin de faire les choses pour toi et la tribu que tu découvres en cours de chemin.
Un excellent roman donc, qui te laisse sur ta fin, mais fuck. On s'en carre l'oignon. Juste du gros respect (et si jamais l'envie t'prends de te taper Jeu blanc dans la foulée, vas-y Gary).
Farewell !