Désormais sur mon blog, en version légèrement modifiée : http://charybde2.wordpress.com/2016/01/26/note-de-lecture-sur-ordre-tom-clancy/
RELECTURE
Troisième lecture (eh oui !) de mon Tom Clancy préféré : à la fin de « Dette d'honneur » (1994), Jack Ryan se retrouve presque « accidentellement » président des États-Unis, et avec « Sur ordre » (1996), on atteint (enfin) le summum du techno-thriller planétaire, emblématique des années de fin de la guerre froide et de début de l' « empire américain », amorcé dans « Jeux de guerre » (1987) et « À la poursuite d'Octobre Rouge » (1984).
Dans le cycle « Jack Ryan » du prolifique auteur de best-sellers, ce (très) gros thriller (deux tomes pour 1 500 pages au total) intervient au moment idéal : dégagé des minuties parfois pataudes (même si superbement documentées) des premiers épisodes (la technologie sous-marine d' « Octobre Rouge », le combat d'infanterie légère de « Danger immédiat », les arcanes du système de frappe stratégique de « La somme de toutes les peurs »), et ne sombrant pas encore totalement dans les obsessions géopolitiques puissamment conservatrices et plus que semi-racistes des ouvrages suivants (« L'ours et le dragon » et « Les dents du tigre »).
Prenant le relais dans la minute qui suit la fin de « Dette d'honneur », on sera frappé quoiqu'il en soit des nombreuses prémonitions que contiennent cet épisode et son prédécesseur : attaques sur le sol des États-Unis, utilisation d'avions de ligne (5 ans avant le 11 septembre...), infiltrations terroristes, collusions entre membres actifs et « passifs » de (déjà) « l'Axe du Mal », second conflit avec l'Irak,... Les préoccupations de toute une classe politique américaine depuis la fin de la guerre froide ne sont jamais aussi bien mises en scène, consciemment et inconsciemment, que par Clancy...
C'est aussi dans cet épisode que la personnalité de Jack Ryan, professionnel consciencieux, humain et plein de « bon sens », se déploie totalement, jusque dans une approche de la politique et un programme de gouvernement préfigurant très largement les revendications des supporters actuels de la « Tea Party »...
Au-delà du plaisir romanesque et du suspense (bon... quand on apprécie les péripéties de la préparation d'une guerre bactériologique, de la constitution d'un convoi naval devant « passer en force » Ormuz sans soutien de porte-avions, du déploiement de régiments d' « armored cavalry » dans le désert saoudien mettant en œuvre pour la première fois un nouveau système de transmission de données tactiques,... tout de même !), en oubliant que, comme toujours chez Clancy, les passages espionnage / terrorisme sont (trop) largement inspirés de Frederick Forsyth, on retiendra un thriller d'ampleur et de qualité, à la valeur documentaire indéniable, dernier de son genre avant que l'auteur ne plonge, à partir de 1998-2000, dans une humeur nettement trop paranoïaque pour mon goût...