Un pamphlet daté
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Des trois personnes essentielles à la dramaturgie que sont l’auteur, le spectateur et l’acteur, c’est ce dernier qu’on entend le moins parler de théâtre. Nombre de dramaturges ont écrit leur conception du théâtre ; les spectateurs - parmi eux d’abord les critiques - ne manquent pas d’exprimer leur point de vue après le baisser de rideau ; mais le comédien, démaquillé, reste muet ou dit fort peu de choses intéressantes sur son métier. Sans doute parce que, selon Louis Jouvet « il ne sait pas penser, il n’en a pas l’habitude ». Pourtant, effaré du vide de la réflexion sur la représentation théâtrale depuis Diderot, Jouvet n’a eu de cesse d’observer, de noter et de commenter ses expériences de comédien tout au long de sa carrière. Certes, il s’agit de fragments parfois inaboutis, mais il est difficile de bouder son plaisir à la lecture de ces pages imprégnées de la passion du théâtre, et que l’humour, la vivacité d’esprit et l’humilité du grand acteur rendent encore plus précieuses. Entre anecdote et aphorisme, Jouvet parvient à faire sentir au lecteur, en particulier dans ses Témoignages, la disposition de l’acteur, sa nécessaire disponibilité, lorsqu’il travaille les rôles de Dom Juan, de Knock, de Tartuffe ou du chiffonnier de la Folle de Chaillot. Une confiance complète dans la force poétique du texte garantit la liberté de son personnage et, partant, sa puissance théâtrale ; c’est là tout ce vers quoi Jouvet voudrait que les acteurs s’exercent. Il est difficile de ne pas voir en lisant ces pages à quel point la leçon du Professeur Jouvet a pu être oubliée au fil des décennies. Le développement phénoménal du cinéma, menace déniée à laquelle Jouvet revient sans cesse, explique sans doute en partie cette évolution vers une mise en scène toute puissante, à laquelle Jouvet, bien qu’ayant lui-même exercé cette fonction à de nombreuses reprises, affirme « ne pas croire ». Au reste, le vibrant éloge qu’il fait du machiniste dit assez sa hiérarchie des gens de théâtre - où le metteur en scène n’a pas sa place.
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le 31 mai 2018
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