C’est le premier roman de Karine Giebel que je lis. J’ai découvert l’auteur par deux nouvelles. Sa façon d’écrire est brutale, sans concession, voire violente.
Qu’on se le dise, Terminus Elicius n’a rien à voir. Certes il est emprunt de suspense car on souhaite savoir qui est cet assassin et pourquoi il semble si proche de Jeanne, qui n’est pas très nette non plus.
Sur 250 pages, Giebel se contente de nous faire sentir les choses sans pour autant se faire professeur ou plutôt psychiatre de ce qu’elle va décrire. La lecture est donc plaisante dans un décor où le paysage magnifique des voyages en train vient se confronter à la dureté de la vie des grandes villes.
Sans être haletant, sans être immersif, le roman se déroule tranquillement, sans soulever de grandes questions (mise à part celle concernant le final de cette histoire impossible), sans non plus se lancer dans des analyses pointues de la folie. Ce n’est pas le but ici. Le but est simplement de raconter une histoire, de présenter un personnage torturé sans jamais donner beaucoup d’espoir. On peut donc se prendre d’amitié pour Jeanne tout en la craignant.
Rien de bien extravagant donc si ce n’est pour les plus gros bémols de ce livre, à commencer par la manière d’écrire de Giebel. Peut-être que c’était pour se donner un style mais il y a des façons de faire qui, justement, ne se font pas en littérature. Comme changer subitement de sujet en plein milieu d’une phrase et faire parler un personnage pour lui-même. Au départ, c’est déstabilisant et on comprend vite le procédé puisque le personnage principal n’est pas net. Ça accentue cette folie. Soit. Mais quand le procédé est repris pour tous les autres personnages qui eux ne sont pas fous, cela signifie quoi au juste ? On décroche tous plus ou moins à un moment donné, nous tournant vers nos propres pensées mais ici, le procédé devient pénible dans la lecture, m’ayant sorti plus d’une fois de l’histoire, me forçant parfois à reprendre des passages qui d’un coup devenaient incompréhensibles.
Autre figure de style visant à trancher, hacher le texte, afin de lui donner une certaine dynamique : l’épitrochasme. Une succession d’expressions, de mots, simplement posés là sans construction particulière, sans verbe. De temps en temps, pourquoi pas mais à répétition, la lecture en devient fatigante et l’histoire perd de son intérêt. Surtout si c’est juste pour meubler, pour nous faire comprendre ce que l’on a déjà compris depuis le début : Jeanne est folle et Jeanne s’ennuie dans sa petite vie monotone.
Sans aller jusqu’à dire que Terminius Elicius ne présente aucun intérêt, ce n’est pas non plus le roman à lire absolument. Les nouvelles du recueil Maîtres du Jeu étaient beaucoup plus palpitantes.