Pour Saint-Exupéry, Terre des Hommes sème le sable de ce qui fait l'Etre dans son désert adoré. Plus qu'un roman initiatique, il est une réflexion sur l'Homme dans ce qu'il a de plus noble, de plus dirigé vers un grand but. Il tire l'homme poussiéreux absurde de son usine aux wagons noirs vers le ciel, les étoiles et les aérolithes qui pleuvent sur le desert.
Ce qui me tourmente, ce ne sont ni ces creux, ni ces bosses, ni cette laideur. C'est un peu dans chacun de ces hommes, Mozart assassiné.
Riche de sa belle expérience, Saint-Ex tire toutes les conclusions qui mènent l'Homme à lui-même par le courage, l'amitié, l'amour des autres, de soi et de la planète, le refus de la guerre et l'envie de donner une forme à son destin.
Seul l'Esprit, s'il souffle sur la glaise, peut créer l'Homme.
Je n'ai pas vu de prose plus poétique que la sienne. Il exprime sur la vie et en quelques mots ce que des siècles de poésie classique ont tenté de retranscrire. Il manie la beauté des mots avec la facilité d'un musicien expérimenté : souple, détendu, volant et rêveur.
Il existe une altitude des relations où la reconnaissance comme la pitié perdent leur sens.
D'une lave en fusion, d'une pâte d'étoile, d'une cellule vivante germée par miracle nous sommes issus, et, peu à peu, nous nous sommes élevés jusqu'à des cantates et à peser des voies lactées.
Terre des Hommes est un enseignement philosophique tolérant et accessible. Il cherche ce qui nous rend profondément Humains. Le temps d'une lecture, on embarque avec le bonhomme dans un avion de l'Aéropostale vers le Sahara, vide de tout mais plein de sens, l'enfance, les plages isolées gorgées de météorites, la guerre d'Espagne, la gorge des Andes et le ventre du monde.
Aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction.