Un vrai ratage de la "cuisine d'assemblage" trop souvent chère à Dan Simmons...
Publié en 2007 (et traduit en français en 2008), "Terreur" marque la contribution de Dan Simmons à l'enrichissement du formidable mythe de la disparition de l'expédition Franklin, évanouie corps et biens à partir de 1845-1846 à la recherche du passage du Nord-Ouest, au milieu du labyrinthe de glaces et d'îles du grand Nord canadien.
Las, si le propos historique est extrêmement intéressant, pour tou(te)s les passionné(e)s d'explorations polaires et d'aventures humaines dans des conditions extrêmes, et si le sujet se prête tout particulièrement à développer une fable puissante sur l'arrogance occidentale, l'incompétence nobiliaire et la surconfiance en la technologie dont ce désastre fut l'emblème absolu, le traitement qu'a retenu Dan Simmons conduit à un véritable ratage.
Succombant à ses démons coutumiers de la cuisine d'assemblage, l'auteur nous propose logiquement à la fois un récit de marine (mais Patrick O'Brian - avec Aubrey et Maturin -, Cecil Forrester - avec Hornblower -, voire Alexander Kent - avec Bolitho -, maîtrisent infiniment mieux la complexe description de l'intérieur de la rude et triomphante Royal Navy du XIXème siècle), un récit d'exploration et d'adversité (mais on reste loin de l'authenticité et de la qualité du Shackleton de "L'odyssée de l'Endurance"), une vague légende d'horreur (mais la mise en scène des mythes démiurgiques inuit y est bâclée, incohérente, et à contre-temps du récit). Enfin, la réappropriation du sort de l'expédition maudite avait été acomplie avec un tel talent et un tel brio par William Vollmann l'année précédente dans "Les fusils" (2006) que la comparaison renvoie inévitablement "Terreur" à son essence : une tentative de best-seller très documentée (l'exploitation de l'ensemble des sources disponible est en effet fidèle et presque exhaustive), qui s'écroule sous son propre poids (les longueurs et les répétitions, même pour Simmons, sont impressionnantes) et sous son absence profonde d'ambition et de propos.
À ne lire que vraiment faute de mieux, donc, une fois que l'on a épuisé le talent des livres mentionnés ci-dessus...