Quand amour est synonyme d’obsession et rime avec souffrance…
Ce livre est dans ma PAL depuis un petit moment, mais c'est le challenge "prix littéraire" m'a encouragé à me lancer. J'avais choisi les prix Nobel de littérature et Mario Vargas Llosa l'ayant reçu le prix Nobel en 2010, je me suis lancée avec quelques appréhensions. Je n'aurais pas dû! Ce livre n'est ni pompeux, ni ennuyeux, ni rien, ce livre est tout bonnement incroyable!
Déjà, plusieurs genres se mêlent pour former une histoire très rythmée et pleine de rebondissements. Au premier plan, se trouve l’histoire d’amour entre « la vilaine fille » et Ricardo, le « bon garçon », mais ce n’est pas un amour banal, non, bien au contraire, Mario Vargas Llosa nous montre ici l’amour passionnel poussé à l’extrême, l’amour destructeur. A l’inverse de nombreuses amourettes romanesques, ce n’est pas la fille qui recherche désespérément l’attention et l’amour de son cher et tendre, mais Ricardo, le « bon garçon » qui fera tout son possible pour se faire aimer de sa dulcinée, qui pourtant ne le lui rend pas. Au second plan, certains éléments historiques viennent donner du relief à la vie mouvementée des deux protagonistes, que nous suivons tout de même sur plus d’une quarantaine d’années ! De la décision de la « vilaine fille » de rejoindre la guérilla à Cuba, à la vie dorée du « bon garçon » lorsqu’il s’installe à Paris en passant par de nombreux séjours à Londres, Tokyo, Lima, nous suivons leurs aventures d’un pays à l’autre et vieillissons avec eux. De nombreux thèmes en relation avec l’histoire sont évoqués, tels la révolution cubaine et ses liens avec le Pérou, la Belle Époque, la période hippie principalement en Angleterre, les prémisses du SIDA, alors que l’on ne savait pas encore ce que c’était… Tous ces éléments sont particulièrement intéressants et n’alourdissent en rien le récit, au contraire, ce sont eux qui donnent du piment et de la cohérence à l’histoire. Au final, événements historiques, histoire d'amour, littérature, aventure et récit du quotidien s'entremêlent pour un résultat palpitant.
Entre les moments où les chemins des nos deux protagonistes se croisent, nous suivons le quotidien de Ricardo, traducteur-interprète, qui voyage dans toute l’Europe et fait de nombreuses rencontres. C’est pendant ces instants, lorsque nous sommes en tête-à-tête avec le « bon garçon » que l’on prend toute la mesure de son obsession et où on se rend pleinement compte de sa détresse. Il souffre de ne pas voir sa dulcinée, mais souffre tout autant quand il est à ses côtés : un cercle infernal duquel on s’imagine bien qu’il ne pourra ressortir indemne. Ces sentiments sont bien décrits et semblent si purs que très vite on ne peut lui tenir rigueur de sa passion dévorante, on comprend qu’il ne peut tout simplement pas vivre sans elle, même si sa vie en pâti…
J’ai beaucoup aimé cet amour impossible et destructeur, de voir jusqu’où un homme était capable d’aller pour une femme que personnellement j’ai eu très souvent envie d’étrangler au fil des pages ! Fugues, maladie, amants et tant d’autres… Comment peut-on sciemment faire autant de mal à un homme si bon, dont le seul défaut aura été de tomber follement amoureux de cette « vilaine fille », dont le surnom est bien en deçà de la réalité. Par moment on espère que Ricardo retrouve sa dulcinée et vive heureux avec elle, par moment on espère qu’il ne croise plus jamais sa route et puisse enfin panser ses plaies et se libérer de cette emprise. De nombreux sentiments contradictoires ont jailli en moi pendant cette lecture et à aucun moment je ne me suis ennuyée dans cette histoire d’amour hors du commun. (J’avoue toutefois qu’il faut quelques pages pour que le récit décolle, mais ces explications sont nécessaires pour cerner la psychologie des deux protagonistes pour comprendre la relation si particulière qu’il y a entre eux.)
Un très bon livre sur une histoire d’amour hors du commun qui aura consumé pendant plus de quarante ans l’homme que l’on peut qualifier de moins rancunier du monde. Tours et Détours de la Vilaine Fille ou quand amour est synonyme d’obsession et rime avec souffrance…