Depuis ma lecture de Ne le dis à personne il y a une dizaine d’années, je guette avec attention chaque nouvelle parution signée par Harlan Coben. Son style simple met en valeur des intrigues rythmées et pleines de rebondissements qui ont toujours su me séduire. J’ai donc lu plus d’une vingtaine d’ouvrages nés de la plume du célèbre romancier. Cette fidélité possède un inconvénient majeur : celui d’être devenu un lecteur assidu difficile à surprendre. La mécanique de l’écrivain américain est bien huilée mais construite sur un squelette devenu classique avec le temps. Ma découverte des derniers opus m’avait donc paru routinière en comparaison de l’enthousiasme généré par les romans plus anciens. Malgré tout, je n’ai pas hésité longtemps à me plonger dans Tu me manques, dernier bouquin édité en France. Le livre est édité chez Belfond dans la collection Noir. L’histoire se déroule sur environ quatre cents pages que j’espérais passionnantes.
La quatrième de couverture offre la mise en bouche suivante : « Dix-huit ans que Kat a perdu son père, flic abattu dans une rue de New York. Et que son petit-ami, Jeff, l’a quittée sans explication. Aujourd’hui, Kat est flic à son tour. Toujours célibataire. Sa meilleure amie l’inscrit sur un site de rencontres. Là, un visage. Le sien. Jeff, son premier amour. Un contact. Froid. Etrange. Le doute s’installe. Qui est-il ? Et puis, cet adolescent aux révélations troublantes. Pour Kat, c’est le début de l’enquête la plus effroyable, la plus sordide, la plus risquée de sa carrière. Des femmes piégées sur le net : un tueur sadique en liberté ; des événements sanglants déterrés du passé. Les mensonges qui nous lient peuvent-ils aussi nous tuer ? »
J’évoquais en introduction une certaine routine dans la bibliographie de Harlan Coben. A mes yeux, il utilise un canevas commun à chacune de ses créations. Les nuances et l’originalité s’inscrivent dans un cadre bien défini. Une recette classique peut générer un repas succulent. Mais son exécution est davantage soumis à la comparaison ou à la critique que ne le serait une innovation qui débroussaillerait des terrains moins explorés. A contrario, ce choix narratif permet au lecteur fidèle de retrouver une atmosphère familière. Ce plaisir nées des retrouvailles avec l’univers d’un écrivain apprécié engendre une ambiance agréable pas dénuée de charmes.
La méthode Coben se développe très souvent à partir d’une disparition ou d’un fantôme du passé qui vient taper à la porte. Tu me manques ne déroge pas à la règle. A partir de ce point, la trame fait naître plusieurs intrigues apparemment parallèles : le meurtre du père de Kat, sa rencontre avec son ex sur internet, la disparition de la mère de cet adolescent… On se doute que toutes ses pièces de puzzle appartiennent au même tableau. Au fur et à mesure des pages, elles vont s’assembler plus ou moins facilement et de manière plus ou moins surprenantes. Cette toile se construit autour d’une riche galerie de personnages. Je ne peux pas dire que les protagonistes soient pourvus d’une personnalité complexe. Néanmoins, l’auteur arrive en quelques mots à les faire exister. L’empathie ressentie à leur égard participe au plaisir de la lecture et à l’immersion dans l’histoire.
Harlan Coben dissémine de nombreuses pistes. Les enjeux sont d’arriver à les alimenter en permanence et à les mêler entre elles à moyen terme. Le premier est habilement respecté. Chaque chapitre attise la curiosité et donne envie de découvrir la suite rapidement. Concernant la mise en commun de toutes ces ficelles narratives, je serai plus nuancée. Certains liens sont de vraies surprises, d’autres sont plus grossiers. Certains aspects du dénouement sont un petit peu « too much ». C’est dommage car l’histoire globale est plutôt intéressante. Malgré tout, l’ensemble reste efficace et divertissant. Cela permet ainsi aisément de fermer les yeux sur quelques défauts.
Pour conclure, ce roman répond aux attentes. Il satisfera les afficionados de l’auteur et saura ravir de nouveaux lecteurs en quête de lecture facile et captivante. Du début à la fin, j’ai été curieux de connaître l’issue de l’enquête de Kat. C’est déjà un gage de réussite. Tu me manques ne fait pas partie des meilleurs crus de l’écrivain mais s’avère, à mes yeux, meilleurs que ses derniers opus. Voilà de quoi me rendre optimiste en attendant la prochaine aventure qu’il nous offrira. Mais cela est une autre histoire…