L'auteur d'Un astronaute en Bohême, Jaroslav Kalfar, a émigré aux Etats-Unis à l'âge de 15 ans. S'il est citoyen américain et écrit en anglais, son inspiration est intégralement tchèque, dans son premier roman, aussi réjouissant, parfois, qu'inégal. C'est une sorte de dystopie qui nous est proposée avec cet astronaute, Jakub, lancé dans l'espace par la République tchèque, pour prélever de la poussière d'un nuage stationné non loin de Vénus. Singulier thème qui incite à croire que l'ouvrage appartient au genre de la SF, ce qui se révèle rapidement faux, même si notre astronaute rencontre un extraterrestre (amateur de Nutella) lors de son périple. Le romancier est bien originaire d'Europe centrale, de par son goût de l'absurde et des questions philosophiques qu'il ressasse, comme un croisement étrange de Kafka et de Kundera. En tous cas, Kalfar est un K original et il a beaucoup mis dans ce premier roman, un peu trop serait-on tenter de dire. Jakub profite de sa solitude pour revisiter son histoire personnelle (son père collaborateur du régime communiste, sa femme qui le quitte alors qu'il navigue dans l'espace) et celle de son pays (de Jan Hus à la révolution de Velours, en passant par les années noires des occupations nazie puis soviétique). L'alliance du fantastique et du réalisme, qui alternent, est pour le moins incongrue, il faut bien l'avouer, mais Kalfar y met beaucoup de conviction et fait preuve d'une mélancolie à laquelle on peut être sensible. Est-il utile de préciser que l'insoutenable légèreté de l'être l'est encore davantage dans l'espace où personne ne vous entend penser ?