"Un début à Paris" constitue le cinquième et dernier volume des souvenirs de jeunesse de Philippe Labro - après "Le petit garçon", "Quinze ans", "L'étudiant étranger" et "Un été dans l'ouest".
On retrouve le jeune Philippe à son retour des Etats-Unis, s'efforçant de faire son trou comme journaliste dans la capitale, au virage des années 50 et 60 (alors que se profilent en arrière-plan les "événements" d'Algérie).
L'auteur retranscrit bien cette atmosphère unique de grands bouleversements à venir, perceptibles dans de nombreux domaines (ce qu'il appelle "le craquement des branches"), avec une jeune génération qui pousse et aspire au changement, bien plus encore que ses devancières. Labro choisit l'exemple du cinéma, avec la Nouvelle Vague frémissante qui fascine déjà, à l'image d'un certain Jean-Paul Belmondo, son physique atypique et sa classe nonchalante.
J'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir ces années-là dans les yeux d'un jeune homme d'une vingtaine d'années.
Mais le roman comporte une large part beaucoup plus personnelle, dans laquelle Labro narre ses débuts dans le journalisme, la rencontre de ses premiers mentors (Cendrars, Hemingway, Lazareff...), reconnaissant lui-même être incapable d'objectivité quant à ce dernier, qui lui mit le pied à l'étrier et l'appelait "la petite merveille".
Ce qui illustre bien la tendance de Labro à se donner comme toujours le beau rôle, sous un vernis d'humilité plus ou moins artificielle.
Le beau Philippe séduira ainsi la plupart des femmes qu'il va rencontrer, à l'image de cette adolescente surdouée aux capacités divinatoires (on se demande alors si le récit bascule dans le second degré? la science-fiction?).
Labro ayant l'habitude de s'inspirer de personnages bien réels, j'aurais aimé savoir qui se cachait derrière la jeune Lumière (c'est son prénom), derrière la perverse baronne Béatrice de Sorgues, ou derrière Wenceslas Dubois, le brillant écrivain mort à moins de trente ans au volant de son Aston Martin. Mais ma recherche sur le web n'a rien donné, à mon grand regret (tout juste suis-je parvenu à identifier Pierre Benichou sous les traits de Jean-François Chemla).
En dépit de ses faiblesses certaines, "Un début à Paris" reste une belle découverte, témoignage éclairant de cette époque fascinante, qui vient conclure de manière satisfaisante les récits de jeunesse du camarade Labro.