Tout homme a eu son moment de bienfaisance ; il le nomme son erreur, il ne recommence pas

J'étais un petit peu déstabilisée, j'attendais de prendre mes aises dans mes lectures, aujourd'hui, je m'y sens un peu mieux, je reconnais même certains traits.

Par contre, je suis perdue. Je croyais lire tout dans l'ordre et il paraîtrait que je suis assez dans l'erreur du point de vue de l'édition Furne. Je vais croire Wikipedia et mon fournisseur de gravures, mais je suis un peu chafouine.

Balzac commence ce roman en nous parlant de contrées dont je me souviens de l'époque où j'habitais à Cergy, rigolo ! L'Isle Adam, Taverny, des noms familiers également des amateurs d'impressionnisme, quelques années plus tard. Il nous parle donc du Vexin et des coucous qui transportent péniblement les gens non fortunés en banlieue (la campagne à l'époque), comparés aux progrès des transports, et en particulier des chemins de fer qui devaient incessamment sous peu voir le jour. Surpris ? J'étais surprise, mais après tout la première ligne en France date de 1827 (culturation).


C'est dans ce cadre que se place la première scène (sur trois) de ce roman initiatique, Un début dans la vie. Oui, un roman avec une saloperie d'ado.

Petit huis-clos : Différents personnages voyagent jusqu'à L'Isle Adam dans le coucou de Pierrotin (un obscur voyagiste en coucou ayant le quasi monopole pour L'Isle Adam.

Nous avons d'abord un petit jeune homme, Oscar Husson, adolescent choyé par sa mère, né dans un milieu protégé, mais élevé sans père et sans fortune, il n'a pas eu le temps d'en profiter et sa mère s'en veut terriblement. Oui, Oscar, c'est lui l'ado. Enfant unique, enfant gâté, souffre de l'amour propre et n'a pas trouvé sa place dans la vie.

Puis nous avons un élégant jeune homme un peu moins jeune, dont Oscar est terriblement jaloux dès le premier regard, Georges Marest.

Et un couple de peintres (couple car ils sont deux, bien entendu), et un fermier, Léger.

Et un personnage mystérieux qu'il n'y a rien que nous qui savons que c'est le Comte de Sérisy qui vient s'occuper d'affaires de son domaine à Presles.

Tout tourne d'ailleurs autour de ce domaine de Presles. Le comte en est le propriétaire, jusque là, point de surprise, il vient à Presles pour s'occuper de racheter la ferme gérée par le père Léger qui entoure le domaine de Presles et l'enclave, l'élégant est le second clerc du notaire du comte. M. Moreau ne figure pas dans cette scène, même si l'on en parle, c'est un ami du comte et régisseur du chateau, c'est aussi l'amour et le protecteur de la mère du petit Husson, celui-ci doit aller en pension à Presles pour que Moreau détermine ce qu'il doit faire de sa vie. Enfin, les peintres vont faire la décoration du chateau, passant après Hippolyte Schinner, le célèbre peintre de La Bourse.

Le jeune élégant jauge les personnes présentes et décide de faire une petite farce mythomane. Bla bla bla, colonel, bla bla bla, sultan, bla bla bla. Tout le monde est vraiment impressionné, sauf le Comte qui se demande si tout cela est bien vrai, car il y en a quelques touches.

Léger s'en fiche un peu, mais à la pause, il parle de son entente avec Moreau pour racheter la ferme, et la revendre au Comte bien plus chère ! Salaud de Moreau, un ami de si toujours !

L'un des peintres se fait passer pour Schinner, venant faire quelques peintures au château draguant les minettes quand il est en voyage, Don Juan en Italie. L'autre peintre, Mistigris, fait plein de jeux de mots cools comme ils sont à la mode dans les gens de la peinture à l'époque. C'est cool. Il ne manquait plus que les bâtons dans les trous et on était complet.

En ce moment, la mode d’estropier les proverbes régnait dans les ateliers de peinture. C’était un triomphe que de trouver un changement de quelques lettres ou d’un mot à peu près semblable qui laissait au proverbe un sens baroque ou cocasse.

— Paris n’a pas été bâti dans un four, répondit le maître.

Oscar veut du coup lui aussi briller. Profitant de l'amitié de sa mère avec Moreau, et de Moreau avec le Comte, il se fait croire très ami avec ce dernier, connaissant des détails pas cool de sa vie. Genre sa femme (au Comte ! donc Madame de Sérisy !) est un peu une pute, et il ressemble à un monstre avec sa maladie de peau.

Alors ça, ça ne plaît pas des masses au Comte tout ça !

Dès l'arrivée, il achète la ferme, vire Moreau, il excommunie le jeune Oscar, si possible, fait virer Georges Marest, le fermier il s'en fout, et les peintres, ils sont cools, ils peuvent rester, Joseph Bridau et Léon de Lora, le jeune Mistigris.

La punition pour Moreau, alors qu'il faisait une bonne action ! Saloperie d'ado ! Punition ! Ah ben non, sa mère l'aime toujours un peu trop.

À cet âge, les impressions morales se succèdent avec trop de rapidité pour que l’une n’affaiblisse pas l’autre, quelque profondément gravée que soit la première. Aussi, le système des punitions corporelles, quoique des philanthropes l’aient fortement attaqué dans ces derniers temps, est-il nécessaire en certains cas pour les enfants ; et d’ailleurs, il est le plus naturel, car la nature ne procède pas autrement, elle se sert de la douleur pour imprimer un durable souvenir de ses enseignements.

Sa mère du coup lui cherche une autre voie, qu'elle trouve dans son oncle, qui a réussi, et lui paie des études d'avoué. Deux ans se passent tranquillement, Oscar devient deuxième clerc de l'étude. Quand il recroise Georges Marest qui, fat et riche, se moque de lui, le fait jouer et lui fait perdre l'argent de l'étude que son chef lui avait filé.

Jeune homme, tu es viré ! Il ne reste donc plus que l'armée, Oscar s'engage donc après avoir raté sa vie deux fois.

Et enfin, il réussit ! Et même au delà de ça, il sauve la vie du fils du Comte de Sérisy (mais siii, le comte dont on parle là haut !), du coup, il est réhabilité. bon, le fils meurt quand même, mais en France, ouf !

Le roman se termine en miroir, avec le même aller à L'Isle Adam, à peu près les mêmes gens bien des années plus tard et tout le monde a bien réussi. Tous ? Non car Georges Marest a perdu sa fortune avec la révolution de Juillet. Tel est pris qui croyait prendre ! Bien mal acquis ne profite jamais ! De ses erreurs on apprend toujours ! Quand on est pauvre, on s'la met en veilleuse. Tout ça.

Et en guise de conclusion, ma phrase préférée de l'ouvrage, sur Moreau, bien mal remercié tiens.

Il est peu d’hommes qui ne se permettent quelques bonnes actions. Ne fût-ce que par curiosité, par amour-propre, comme contraste, par hasard, tout homme a eu son moment de bienfaisance ; il le nomme son erreur, il ne recommence pas ; mais il sacrifie au Bien, comme le plus bourru sacrifie aux Grâces, une ou deux fois dans sa vie.
Phae
8
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le 4 juin 2013

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Phae

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