Un jeu sans fin


Quand un nouveau livre de Richard Powers est publié, c’est un évènement et je suis impatient de le lire. J’admire la plume de cet écrivain et aime toujours les sujets qu’il aborde et c’est extrêmement bien documenté, C’est aussi une part de sa vie qui est très riche. Richard Powers aime la musique, il en a fait. Il est curieux et scientifique.

Parmi les livres que j’ai préférés, je place en tête Orfeo qui n’a pas eu le succès que j’aurais espéré. Puis l’arbre monde, le temps où nous chantions etc. etc.

Comment dire que j’ai été déçu par ce dernier livre, alors que l’ensemble de la presse et des lecteurs ne tarissent pas d’éloge. Des pages et des pages de critiques qui résument le livre, citent des passages qui sont très beaux. D’où vient cette désillusion ?

Les personnages de Richard Powers sont bons et se heurtent à la méchanceté d’un monde dans lequel ils ont du mal à trouver leur place. Ici encore c’est vrai.

Cependant j’ai l’impression qu’il cherche à cocher toutes les cases de ce qui fait l’actualité.

Il y a Rafi Young le noir que son père a voulu préserver en l’envoyant dans le milieu dirigeant blanc et qui se sent mal à l’aise tout le temps.

Il y a le blanc Todd Keane qui va devenir extrêmement riche par le développement de l’informatique.

Il y a la jeune fille Evelyne Beaulieu (Evie) qui se confronte à un monde d’hommes par la plongée sous marine.

Il y a la petite polynésienne Ina Aroita de Makatea qui n’est là que pour justifier la fin du livre et le bon peuple polynésien perdu sur son ile déserte.

Nous suivons tout ce petit monde et nous avons droit à des pages et des pages de pseudo psychanalyse de ces étudiants mal dans leur peau dans un monde qui ne leur convient pas.

Il n’y a aucun méchant dans l’histoire. Même Elloit le gamer informaticien n’a rien vu venir. Il n’a jamais eu les dents longues.

Les insulaires isolés sont tous des gentils. Il n’y a aucune friction sur l’île. Or il est bien connu pourtant qu’il suffit d’isoler des personnes pour qu’elles se tapent dessus. Tout est trop beau.

Que dire de ces pages entières sur les descriptions de l’océan , la liste des poissons et des fonds marins ?

Que dire de cette description de l’avènement de l’IA. De l’évolution des ordinateurs. C’est Microsoft pour les nuls ?


Tout cela n’empêche pas de très beaux paragraphes

Quelle est le but de ce livre ? Est-ce un conte ? Les divinités polynésiennes , la résurrection par l’IA, la vie au plus près de la nature, tout cela est abordé. La mort des océans, le réchauffement climatique.

La partie du livre qui traite de l’amitié et des relations entre Rafi et Eliot et de leur vie étudiante est très longue très détaillée. Avec une analyse de leurs comportements de leurs vies de leurs relations avec leurs parents etc. Le comportement de Rafi toujours à fleur de peau et celui d’Eliot se sentant toujours coupable de ce qu’il a pu dire et qui a vexé Rafi. La brouille entre les deux amis est pratiquement incompréhensible. La partie qui traire de l’île et des habitants est ténue. Aucune analyse des comportements, seulement une vision idyllique, la nature et les dieux, la vie au grand air, un peu, et beaucoup de plastiques .

J’aurais aimé un peu plus d’équilibre entre les deux parties, un peu plus de lien. Si on est dans le conte et le merveilleux qui prend fin peut-être , à quoi bon s’appesantir sur les destinées et surtout sur le passé de ces deux étudiants.

Si on est dans une véritable dystopie, pourquoi n’avoir pas plus analysé les comportements des insulaires. On sait bien que les nouveaux arrivants sur une île ou dans un village n’ont pas droit à la parole. Alors que là, les américains et la canadienne sont extrêmement bien accueillis. C’est du conte.

Mais, il semble que je sois le seul, lectrices, lecteurs et critiques ont tous adoré. Je suis certainement passé à côté de ce Powers là. Le message n’est pas passé. La mayonnaise n’a pas pris. Y a-t-il quelq’un qui pense un tant soit peu comme moi ? Même si je garde toute mon admiration pour cet auteur, ce livre avec de beaux passages n’atteint pas son but et quel but ?


cazesraymond
5
Écrit par

Créée

le 16 avr. 2025

Critique lue 24 fois

cazesraymond

Écrit par

Critique lue 24 fois

D'autres avis sur Un jeu sans fin

Un jeu sans fin
Nelly-H
10

Critique de Un jeu sans fin par Nelly-H

Il est difficile de parler de ce livre, tant personnages, intrigues et temporalités s’entrecroisent. On fait la connaissance de Rafi et Todd, deux étudiants américains passionnés par le jeu de go...

le 21 mars 2025

Du même critique

Comédies françaises
cazesraymond
3

Trompé sur la marchandise.

J’aime l’écriture de Reinhardt, et, quand j’ai su le sujet du dernier roman, j’ai eu hâte de le lire. Quand l’histoire d’un roman se mêle à la grande Histoire, je suis toujours preneur. En plus, un...

le 6 sept. 2020

7 j'aime

2

La Panthère des neiges
cazesraymond
3

des mots pour rien

Encore déçu par un prix littéraire. Mr Tesson s'écoute écrire, tout est bon pour une citation, Mr philosophe et cite. Que de noms célèbres évoqués. Tous sont connus pour ne pas perdre le lecteur...

le 27 juin 2020

7 j'aime