Cela aurait pu être un polar. D'ailleurs, on le classe parfois dans cette catégorie. Pourtant, il n'a rien d'un polar. Surtout pas son héros.
Richard Brautigan s'amuse avec les codes du genre pour les retourner avec grand plaisir.
Le héros du jour s'appelle C. Card et il est détective privé. Du moins, il aime à le penser bien que sa situation évoque plutôt l'accident de parcours. Sans le sou, malhonnête ; Card est avant tout un grand rêveur. Son monde n'est pas le nôtre, c'est Babylone, une rêverie qui lui permet de s'imaginer en grand. En très Grand. Le reste du temps, dans la réalité, c'est un corniaud endetté. Mais terriblement attachant. Et le voilà sur une affaire...
Brautigan n'a pas son pareil pour créer un univers pittoresque et des personnages bien décalés. On est servi avec Card, tellement à côté de ses pompes que même le lecteur a de l'avance sur lui. Raconté à la première personne, Un privé à Babylone se montre généreux dans les réflexions et délires absurdes de son personnage. On s'attendait à un polar, et voilà qu'on se retrouve dans un pastiche. Écrit simplement, et parfois sacrément drôle, le livre se lit très rapidement. La finalité compte moins ici que le voyage aux côtés d'un esprit étrange qui se montre rapidement aimable.
Soyez prévenus : ce n'est pas un roman policier qui vous attend, mais une tranche de vie acidulée. Et pas n'importe laquelle puisqu'elle appartient à une pure figure de la décontraction et du laisser-aller.
En soi, c'est déjà assez revigorant.