[Avec spoilers] J'ai dévoré l'histoire des frangines Delorme

Emma et Agathe Delorme sont sœurs. Elles ont grandi l’une contre l’autre, mais sont pourtant très différentes. Agathe, la plus jeune, bordélique et ardente, a toujours pris toute la place dans le bain, dans la chambre et dans le cœur d’Emma. Après cinq ans d’un silence inexpliqué, Emma donne rendez-vous à Agathe dans la maison de vacances : Mima, leur grand-mère adorée, n’est plus, il faut vider les lieux et faire le tri dans les souvenirs. Les sœurs Delorme ont une semaine pour tout se dire et rattraper le manque de l’autre. Parviendront-elles à réparer le passé ?

UNE BELLE VIE est ma troisième lecture de l'auteure Virginie Grimaldi (après Quand nos souvenirs viendront danser & Il est grand temps de rallumer les étoiles) et je dois bien avouer que ce sont des lectures qui m'ont émue autant que j'y ai prit du plaisir.

Qu'on se comprenne, lorsqu'on termine la lecture d'un Grimaldi, on ne se questionne pas sur le sens de la vie, les travers de la société de consommation ou le bienfondé du libre-arbitre. Ce qui vaut à l'auteure et à son œuvre une réputation un peu"gnan-gnan", notamment de la part de celleux que je soupçonne de faire partie du mouvement "snobisme culturel". Désolée messieurs-dames, n'est pas Zola ou Hugo qui veut, et après tout comme on dit pas de fumée sans feu, alors si des auteurs/trices comme Virginie Grimaldi ou Marc Lévy vendent aussi bien leurs bouquins, c'est que leurs écrits parlent à certain-es, ne vous en déplaise.

Grimaldi, de ce que j'en ai lu jusque-là, mets en scène des personnages du quotidien, des monsieur et madame tout-le-monde mais dont la vie se dévoile, au fil des pages, pleines de fissures, de blessures pas tout à fait cicatrisées. Cela l'amène à parler de sujets dits "sérieux" mais de manière quotidienne.

Et je crois que c'est ce que j'apprécie.

C'est le cas ici, par exemple, avec le personnage d'Agathe.

Agathe apparaît d'abord comme la petite sœur turbulente mais tellement mignonne qu'on lui pardonne tout. Celle qu'on protège de la cruauté, qu'on protège du chagrin à la mort de son père, qu'on protège de sa mère qui, après le décès de son mari, devient violente envers ses filles. Elle est une enfant fragile, hyper-sensible, victime de crises d'angoisses dès le plus jeune âge. Puis elle apparaît, notamment à travers les récits fait par sa sœur aînée, comme une enfant un peu caractérielle quand même, avec qui on doit marcher sur des œufs en permanence. On comprend ensuite que son mal-être est probablement plus profond, plus clinique, jusqu'à ce qu'on mette les mots dessus : trouble bipolaire.

Ce diagnostic, s'il est "préparé" depuis plusieurs pages lorsqu'il arrive, est balancé presque entre la poire et le fromage, lors d'une conversation gênée entre les frangines. Comme quelque chose dont il fallait bien parler à un moment donné, mais dont on avait pas du tout envie de débattre. Ce qui donne l'impression que l'auteure traite le sujet avec légèreté.

Pourtant, tout au long du récit, c'est là. C'est comment Emma, l'aînée, vit cette vie avec une sensibilité différente : d'abord comme un rempart protecteur entre elle et les dangers du monde, puis la culpabilité de vouloir s'en détacher, la jalousie d'être celle qui vient secourir et jamais l'inverse. C'est comment Agathe vit elle-même cette différence, sans la comprendre, sans se comprendre elle-même, comment elle s'accroche à ses repères.

Ce sont des récits de tranches de vie dans lesquelles, au détour d'une tournure de phrase, d'un élément de langage ou d'un mot échappé, on devine la complexité des rapports humains, l'amour mêlé à de la jalousie, l'envie de laisser le passer où il est teintée de ressentiments.

Virginie Grimaldi finit son roman (ses romans ?) en demi-teinte, une fin douce amère qui fait qu'on a versé une larme mais qu'on ferme le livre un sourire aux lèvres.

A lire confortablement installé sur votre transat au bord de la piscine, un Hugo Spritz à la main.