Il était une fois l'Univers, cet édifice si colossal qu'aucun terme d'aucun vocabulaire de la planète ne permet d'en exprimer la vastitude. Âgée d'une quinzaine de milliards d'années au moins – dit-on sans en être vraiment sûr puisque une telle affirmation revient à dire qu'on sait ce qu'est l'Univers alors que sa réalité exacte persiste à nous échapper –, donc prodigieusement ancienne, cette construction dont l'architecte nous dépasse forcément, dans tous les sens du terme, a, d'une manière assez curieuse, du moins du point de vue du profane en astrophysique, une histoire plutôt brève. D'où le titre, fort à propos, de cet ouvrage.
Non que rien ne soit arrivé durant tout ce temps, bien au contraire, mais ces événements se résument en fait, et pour résumer assez grossièrement, à l'affinage progressif d'une « matière brute » originelle jusqu'à ce que celle-ci finisse par engendrer des formes de vie sur au moins une des planètes que compte cette vastitude. « Matière brute » qui trouve ses origines dans ce fameux Big Bang dont on ne cesse de nous rebattre les oreilles sans pour autant qu'on sache de quoi il s'agit exactement et encore moins ce qu'il y avait avant ; c'est-à-dire, pour reformuler cette interrogation au moins sous-jacente, de quoi ce phénomène est issu : car ce « début » de l'univers vient forcément de quelque part, ce qui implique qu'il y avait bien « quelque chose » avant le début, et donc que ce début n'en était pas un – pas vraiment en tous cas...
Ce livre est plein de « révélations » de ce genre, et à peu près chacune d'entre elle se montre tout aussi capable que celle-ci de vous donner le tournis. Mais la plus surprenante d'entre elles concerne la nature de la texture même de la réalité : de quoi elle se compose réellement, de quoi elle est faite. Nul ne le sait à vrai dire. Voilà pourquoi ce livre porte comme titre « Une brève histoire du temps » et non « Une brève histoire de l'univers » : car le temps est la seule chose dont on est certain qu'elle existe, ce qui est d'autant plus curieux qu'il n'a ni consistance ni odeur et encore moins de texture ou de poids. Pourtant, il est bien là et nous n'avons même pas besoin de montre ou d'horloge pour le mesurer : il suffit d'attendre que le temps passe...
En bref, si nous sommes certains qu'il existe, nous sommes incapables de le définir. D'autant plus qu'il varie d'un endroit à l'autre de l'univers, simple question de vitesse de déplacement d'un corps qui, lorsqu'il commence à dépasser une certaine allure, voit l'écoulement du temps se modifier – mais juste pour lui, pas pour les autres qui se déplacent moins vite. C'est ce que nous a enseigné Einstein à travers sa fameuse Relativité, celle-là même qui nous a permis de dépasser certaines illusions pour nous permettre de nous engager dans des examens bien plus approfondis de ces éléments dont on était certain qu'ils existaient...
Jusqu'à ce que l'incroyable se fasse jour et fonde une branche entièrement nouvelle des sciences physiques. Cette branche s'appelle « physique quantique » et elle nous enseigne que tout ce qui nous entoure n'a rien de ce qu'on croit – et peut-être même rien du tout d'ailleurs, puisqu'il est tout à fait possible que ce « tout » n'existe pas. En d'autres termes, l'univers entier pourrait très bien se résumer à une vaste illusion dont les éléments qui la composent se réduisent en fait à de simples probabilités. Une vue de l'esprit en quelque sorte.
Stephen Hawking nous fait là une superbe leçon de cosmologie mais surtout de modestie, car en dépit des avancées tout à fait admirables et à bien des égards époustouflantes du savoir en matière d'astrophysique tout au long du XXème siècle, ce que l'auteur nous démontre en fait ici c'est que les mystères de l'univers demeurent malgré tout à l'échelle de sa vastitude prodigieuse...